La rentrée solennelle du barreau du Bénin s’est déroulée vendredi 25 novembre dernier au siège de la cour d’appel de Cotonou sous la houlette du bâtonnier de l’Ordre des avocats du Bénin. C’était en présence des acteurs de la famille judiciaire. Le garde des Sceaux, ministre de la Justice a représenté le chef de l’Etat.
"Quel type d’avocat pour une justice indépendante?". Telle est l’interrogation qui a fondé les réflexions relatives au lancement de la rentrée solennelle du barreau du Bénin.
Témoignant sa gratitude aux avocats ou à l’ordre où ils sont inscrits, Thierry Damase Ogoubi, premier président de la cour d’appel s’est réjoui de l’occasion qui est ainsi offerte aux acteurs de la justice de se retrouver pour méditer et confronter les idées afin d’offrir aux populations une justice davantage crédible. « Ces occasions de rencontre sont rares. Si on pouvait inventer d’autres sur des thèmes variés pour réfléchir, ce serait bien», s’est réjoui le procureur général. Pour lui, le thème retenu appelle tous à la réflexion. Le procureur général renvoie à la maxime philosophique «Connais-toi toi-même » pour indiquer ou retenir « Sois toi-même ».
Un thème pour une rencontre qu’accueille avec beaucoup d’émotion Me Joseph Djogbénou, avocat lui-même mais qui occupe depuis l’avènement du gouvernement de la Rupture le poste non moins stratégique de ministre de la Justice. «C’est avec beaucoup d’émotion mais aussi d’enthousiasme, avec beaucoup de bonheur que je prends la parole», a déclaré le représentant du président de la République. Pour lui, le contexte d’interrogations et de contestations qui secoue la justice préoccupe le gouvernement. Ce dernier, s’est-il engagé, ne ménagera aucun effort pour assurer ce qui relève de son ressort. «Vous avez l’écoute du gouvernement que sur tous ces sujets, les réponses les plus appropriées seront apportées aux préoccupations de l’heure», a affirmé Me Joseph Djogbénou qui a promis que les défis de l’heure seront relevés grâce à l’apport, à la contribution responsable des avocats au pouvoir judiciaire qui demeure avant tout un pilier inestimable du développement.
« La question de l’indépendance de la justice fait débat…la problématique de l’indépendance de la justice reste une question de la plus haute importance», a soutenu Me Cyrille Djikui pour justifier le thème qui s’inscrit dans le contexte socio-politique actuel marqué par des interrogations qui inclinent à y réfléchir. Pour le bâtonnier, l’état des lieux révèle que « notre système ne permet pas d’exclure certaines hypothèses de sorte qu’il est difficile de savoir à qui on peut reprocher la carence et à qui on peut imputer la corruption», « que les chaines qui empêchent traditionnellement la justice dans notre pays d’être indépendante empruntent la voie des groupes de pression que les amis, les parents, le milieu religieux les clubs services et autres associations » et que « la servilité dans laquelle se trouve la justice prend sa source dans le comportement des acteurs professionnels que sont les avocats ». Il s’ensuit que le clientélisme la corruption, le manque de professionnalisme dans la gestion des dossiers le manque de loyauté et la non mise à jour des connaissances ont gagné les avocats, ce qui nuit forcément à l’indépendance de la justice. Ainsi le bâtonnier indique à ses confrères ce qui est attendu d’eux : « d’arrêter l’élan du magistrat lorsqu’il s’écarte des règles de procédures, de dénoncer la violation de la loi, d’éclairer le juge par un travail de recherches pointues sur la question de droit qui lui est soumise, de le contraindre à rendre justice au lieu de rendre service ». Il apparait dès lors, rappelle le bâtonnier que les avocats doivent « maintenir la justice en marche, reflet de l’expression d’une justice libre et indépendante aux côtés des magistrats. S’il y a une qualité avec laquelle l’avocat ne doit jamais faire de concession, c’est sa liberté, a retenu le bâtonnier qui a invité ses confrères à savoir choisir leurs fréquentations pour que l’opinion dise d’eux « C’est un homme de principe, il ne sert à rien de lui demander des faveurs dans sa vie professionnelle ».
Le bâtonnier a invité ses confrères à se départir des mauvaises habitudes pour épouser des comportements vertueux et a annoncé que le conseil de l’ordre prendra ses responsabilités. Il en a profité pour plaider afin que l’Etat soutienne les avocats dans le cadre de la construction de leur maison en chantier et pour ceux qui parfois s’éteignent ou croupissent dans le dénuement.
Des doléances qui ont reçu un écho favorable ou mieux, une écoute attentive du représentant du chef de l’Etat.
Didier Pascal DOGUE