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Gouvernance : Social Watch crucifie le régime Talon
Publié le lundi 28 novembre 2016  |  Matin libre
Gustave
© aCotonou.com par Didier Assogba
Gustave Assa,le président de Social Watch Bénin lors de l`Atelier national d’échange des organisations de la société civile et des élus locaux sur la localisation des ODD
Palais des congrès de Cotonou, lundi 21 novembre 2016. Atelier national d’échange des organisations de la société civile et des élus locaux sur la localisation des ODD




Dénonciation du gré à gré
L’Assemblée nationale interpellée
« Le peuple s’impatiente à raison… », dixit Gustave Assah

Social Watch Bénin rompt le silence. Son président du conseil d’administration, Gustave Assah a fait une sortie médiatique, samedi 26 novembre 2016, pour jeter un regard critique sur la gouvernance au Bénin ces 7 derniers mois. Les marchés et contrats de partenariat public-privé étaient au cœur de son réquisitoire à l’encontre du gouvernement de la Rupture.
Lire l’intégralité de la déclaration

Déclaration de Social Watch Benin sur les marchés et contrats de partenariat public privé par le gouvernement du Benin

La situation politique nationale actuelle, notamment en rapport avec les dernières décisions prises par le Conseil des ministres et présentées par le Ministre d’Etat, Monsieur Pascal KOUKPAKI dans son point de presse et les affaires de trafic de stupéfiants annoncées depuis quelques jours est préoccupante pour le peuple béninois tout entier et pour Social Watch Bénin.
S

ocial Watch Bénin qui s’est donné pour mission de contribuer au développement durable à travers le renforcement et la promotion d’un environnement favorable à la bonne gouvernance et qui rêve d’une société où les citoyens participent effectivement à la gestion des affaires publiques se sent interpelé. C’est ce qui justifie sa sortie de ce jour.
Mesdames et Messieurs,

Le Président de la République, Monsieur Patrice TALON disait dans son discours d’investiture, le 6 Avril dernier que :

« Comme vous le voyez le mandat qui s’ouvre augure d’heureuses perspectives que je m’engage à transformer en actions concrètes destinées à l’essor du Bénin, au bien-être et à l’épanouissement de nos populations ».

Le Président de la République ajoute que « Je prends le ferme engagement devant le peuple béninois et devant le monde ici représenté, que sous mon mandat, la gouvernance au sommet de l’état, aura constamment à cœur de rechercher et d’identifier où qu’elles se trouvent les compétences nécessaires dont notre pays a besoin pour apporter le plus efficacement possible, les réponses nécessaires aux besoins de développement et de bien-être de nos populations des villes et des campagnes. C’est la sélection par le mérite et l’observance des valeurs qui font la qualité d’une gouvernance. Cette sélection est d‘autant plus efficace si elle se fonde sur l’égalité réelle des chances lors des concours de recrutement, lors des appels d’offre public, lors de la reconnaissance et la récompense de la qualité du travail accompli».

A l’occasion de sa première descente dans le septentrion depuis qu’il est au pouvoir, le Président de la République indique que : « Vous savez, quand on a faim, on est impatient. Quand on manque de tout, chaque minute qui passe, paraît une éternité. On n’a pas le temps d’attendre. Et c’est ce que nous vivons aujourd’hui. Mes compatriotes qui ont fondé tant d’espoir dans mon élection, ont l’impression que les sept mois qui viennent de s’écouler constituent déjà presque tout le mandat. C’est à raison qu’ils sont si impatients, parce que nous manquons de tout. Mais, on a beau avoir faim, il n’est pas convenable de manger un plat mal préparé. Il faut avoir la patience d’attendre qu’il y ait les ingrédients, qu’ils soient mélangés pour être portés au feu que la sauce mijote et que le repas soit digeste ».

L’analyse des déclarations du Président de la République, Monsieur Patrice TALON, démontre clairement sa prise en compte effective de la situation sociale du Pays et de l’impatience de la population béninoise depuis son élection.

Pour Social Watch Benin, ’l’état social est l’un des grands acquis de notre démocratie. Il faut pour notre pays, un niveau élevé de protection sociale et de la prise en compte par les dirigeants des désidérata du peuple souverain détenteur de la souveraineté nationale. De plus, nous sommes conscients que la paix sociale est un atout important pour notre compétitivité. Il est donc important de pouvoir compter sur le sens de justice et d’équité du gouvernement dans les prises de décisions. Le peuple béninois s’impatiente à raison car comme l’a dit Monsieur Nelson MANDELA : « Tant que la pauvreté, l’injustice et les inégalités flagrantes persisteront dans le monde, nul ne pourra prendre de repos ».

Face à cette situation, nous invitons le Président Patrice TALON et son gouvernement à davantage prendre la mesure de la situation et à faire en sorte qu’un délai soit accordé pour que la « sauce ne dure longtemps au feu pour mijoter et que le repas ne soit prêt que lorsque la faim aurait pris le dessus sur nous tous ». Il est également important de signaler au Président de la République et à son gouvernement de veiller à ce que « pendant que d’autres attendent patiemment la sauce qui serait en train de mijoter, d’autres par des raccourcis ne se servent avant tout le monde ».

L’une des questions qui suscitent également la sortie de Social Watch Bénin aujourd’hui est la mise en œuvre de la loi N° 2016-024 portant cadre juridique du partenariat public privé en République du Bénin à travers la décision du Conseil des Ministres en sa séance du 18 Novembre 2016 présentée par le ministre d’Etat, Secrétaire Général de la Présidence Monsieur Pascal KOUKPAKI dans son point de presse et qui consiste à attribuer des marchés par la procédure d’entente directe encore appelée contrat gré à gré.

Social Watch Bénin, dans le cadre de son projet « Les Citoyens dans les marchés publics au Bénin (CMPB)», s’impose d’interpeller au respect strict de la loi N° 2016-024 portant cadre juridique du partenariat public privé en République du Bénin en ses articles 17, 19 et 20.

Selon les articles 17, 19 et 20 de la loi portant cadre juridique du partenariat public privé en République du Bénin,

« L’établissement et la conclusion des contrats de partenariat public privé sont soumis aux principes suivants :

- l’économie et l’efficacité du processus, la liberté d’accès, l’égalité de traitement, la reconnaissance mutuelle, la transparence des procédures ;

- la procédure de passation des contrats de partenariat fait l’objet d’une publicité suffisante précisée à chaque étape de la procédure permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes ;

- Les contrats de partenariat public-privé sont prioritairement passés par appel d’offres international ouvert en une ou deux étapes précédé obligatoirement d’une pré-qualification ;

- Exceptionnellement, un contrat de partenariat public-privé peut être passé par entente directe, après accord de la Direction Nationale de Contrôle des Marchés Publics (DNCMP) après avis de la Cellule d’Appui au Partenariat Public-Privé (CAPPP) lorsque la réalisation ou l’exploitation d’un projet ne peut être menée que par un partenaire privé déterminé du fait de l’absence de concurrence après appel d’offres ouvert international pour des raisons techniques, des raisons liées à la protection de brevets, de droits d’auteur ou d’autres droits de propriété intellectuelle ou des raisons liées à la protection d’autres droits exclusifs ».

La lecture combinée des dispositions ci-dessus citées indique clairement que les contrats de partenariat public-privé sont prioritairement passés par appel d’offres international ouvert et que c’est de manière exceptionnelle et à une triple conditions que l’on peut faire recours à l’entente directe encore appelée « le gré à gré ». Pour les conditions, il faut noter :

1. L’absence de concurrence après appel d’offres ouvert international pour des raisons techniques, des raisons liées à la protection de brevets, de droits d’auteur ou d’autres droits de propriété intellectuelle ou des raisons liées à la protection d’autres droits exclusifs Le lancement de la procédure par un appel d’offres ouvert international ;

2. Obtenir l’accord de la Direction Nationale de Contrôle des Marchés Publics (DNCMP) ;

3. Obtenir l’avis de la Cellule d’Appui au Partenariat Public-Privé (CAPPP).

Si on s’en tient au point de presse du Ministre d’Etat, nulle part, il n’a été fait mention d’un appel d’offres ouvert international avant l’autorisation de signature de ce contrat avec les partenaires retenus.

Même si la Direction Nationale de Contrôle des Marchés Publics (DNCMP) aurait donné son accord, cet accord devait se baser sur l’avis de la Cellule d’Appui au Partenariat Public-Privé (CAPPP) qui n’est pas encore installée ni opérationnelle.

 Quelle est l’extrême urgence ne pouvant pas permettre de procéder à un avis d’appel d’offre international ?
Face aux inquiétudes de bon nombre de citoyens sur la transparence dans la gestion de ce dossier de contrat de concession, il s’avère nécessaire et urgent de rendre public, l’accord de la Direction Nationale de Contrôle des Marchés Publics (DNCMP) concernant le dossier et, le rapport de l’évaluation qui a fait montre des insuffisances reprochées à l’actuelle société en charge de sécurisation des entrées et sorties à l’aéroport international Cardinal Bernardin GANTIN de Cotonou.

Selon l’article 2 du Directive n° 01/2009/CM/UEMOA « Les contribuables et les usagers des services publics sont clairement, régulièrement et complètement informés de tout ce qui concerne la gouvernance et la gestion des fonds publics. Ils sont mis dans les conditions d’exercer, dans le débat public, leur droit de regard sur les finances de toutes les administrations publiques. »

En clair, comment peut-on obtenir un avis d’une structure qui n’existe pas encore alors même que le législateur n’a pas permis une institution transitoire en attendant son installation ?

Face à cette situation, Social Watch Bénin invite le gouvernement du Président Patrice TALON à se conformer strictement à la loi portant cadre juridique du partenariat public privé en République du Bénin afin de garantir une crédibilité, une transparence dans la mise en œuvre de cette loi dans l’intérêt de notre pays...

SOCIAL WATCH Bénin, dans sa mission de veille citoyenne jouera pleinement son rôle pour le respect des lois de la République notamment dans cette nouvelle matière de partenariat public privé.

Au regard de tout ce qui précède, Social Watch Bénin recommande :

 A l’endroit du Gouvernement :

1. De rendre publics et accessibles, les différents documents et rapports des différentes étapes de la sélection de la société MORPHODYS pour la sécurisation des aéroports au Bénin ;

2. De prendre tous les décrets d’application de la loi portant cadre juridique du PPP au Bénin ;

3. De procéder à une large vulgarisation de la loi et de ses décrets d’application.

 A l’endroit de l’Assemblée Nationale :

1. D’adresser au Gouvernement, une question orale sur les modes et procédures de sélection des sociétés MORPHO DYS pour la « sécurisation des aéroports du Bénin » et de la société SAFRAN IS pour le « recensement administratif à vocation d’identification de la population » etc ;

2. De demander au Gouvernement, le catalogue actualisée annuellement, des projets susceptibles d’être exécutés en mode partenariat public-privé au Bénin établi par la Cellule d'Appui au Partenariat Public- Privé (CAPPP), validé par décret pris en Conseil des Ministres, de même que la liste des projets priorisés, laquelle aussi validée par décret ;

3. D’exiger du Gouvernement, la communication à l’Assemblée Nationale, avant la mise en œuvre, de tous les projets hors catalogue établi par la Cellule d'Appui au Partenariat Public- Privé (CAPPP) ;

4. D’exiger du Gouvernement, la publication des contrats des marchés publics, des contrats de concession en mode PPP entre l’Etat et les concessionnaires conformément à la Directive n° 01/2009/CM/UEMOA qui impose aux Gouvernements des Etats membres, la publication de tout contrat avec les entreprises exploitant des concessions de service public.

Pour finir, nous voulons rappeler que depuis quelques semaines, nos efforts visant à entretenir et à promouvoir l’image de notre pays à l’étranger se heurte à un obstacle supplémentaire, que nous ne saurons minimiser. Il s’agit des affaires de trafic de drogue et de stupéfiant qu’on découvre au port de Cotonou. Même s’il faut féliciter nos agents en charge des enquêtes dans ce domaine, il est à préciser que la grande publicité qui entoure ce travail nuit à l’image de notre pays. Pour nous, il faut un effort considérable pour réparer cette image que nous donnons à notre port.

Social Watch recommande plus de professionnalisme dans le traitement de cette délicate situation et invite les uns et les autres à mettre le pays au-dessus de tout surtout de nos intérêts personnels et égoïstes.
Notre pays le Bénin mérite mieux.

Fait à Cotonou, le 26 novembre 2016
SOCIAL WATCH BENIN
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