Une fois encore la montagne a accouché d'une souris. Les Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) réunies en Conseil national, samedi 03 décembre dernier, n'ont pu faire mieux que la rencontre de Grand-Popo entre députés Fcbe et alliés. La déclaration d'appartenance à l'opposition sur laquelle beaucoup d'observateurs de la vie politique nationale attendent ce regroupement qui a accompagné l'ancien président Boni Yayi ces 10 dernières années n'est pas à l'ordre du jour. Normalement, c'est le congrès dit d'orientation et de mutation en préparation qui devra trancher cette question. Mais rien n'est sûr tant les positions s'achoppent quant à l'opportunité ou non de se déclarer de l'opposition politique au régime de la Rupture.
Trois camps se dégagent au sein de la grande famille cauris ; les radicaux, les modérés puis ceux qui lorgnent du côté de la Rupture. Les radicaux sont ceux qui pensent qu'ayant perdu le pouvoir après 10 ans d'exercice, les Fcbe n'ont autre alternative que de se déclarer de l'opposition. Parmi eux, des anciens ministres, fidèles à Boni Yayi et qui ne bénéficient plus d'un mandat électif en cours. Alassane Soumanou Djemba a porté leur voix lors du 4e Conseil national. Pour lui, il n'est pas question pour les Fcbe de se dérober à ce statut d'opposant qui naturellement leur revient.
Les modérés sont ceux anciens ministres, élus locaux qui ont peur des conséquences d'une déclaration d'appartenance à l'opposition sur la suite de leur carrière politique. Soit ils risquent d'être rattrapés par leur passé face aux audits en cours, soit ils craignent d'être emportés par le vent de destitution de maires en vogue, une fois qu'ils auraient été identifiés comme faisant partie de l'opposition radicale.
Le gros lot de ceux qui veulent composer avec la Rupture se trouve parmi les députés Fcbe à l'Assemblée nationale. Ils pensent que Patrice Talon a besoin d'eux pour opérer ses réformes. Ils comptent profiter de leur statut pour négocier une contrepartie quant à la suite de leur carrière politique. Pour eux, une déclaration d'appartenance à l'opposition n'est pas à l'ordre du jour, en tout cas jusqu'au moment où ils seront convaincus que Patrice Talon les ignore ou ne veut composer avec eux. Ce n'est qu'à cette condition, qu'ils seront contraints de faire de l'opposition. Mais c'est encore trop tôt pour se décider.
Au congrès qui s'annonce, on risque donc d'assister à la même chose. Aucune décision radicale avec des déclarations de félicitation à l'endroit de Boni Yayi pour contenter les radicaux et à l'endroit de Patrice Talon aussi pour contenter les modérés et ceux qui pensent qu'il est encore possible de composer avec la Rupture.On pourrait alors une fois de plus assister à une position ambigüe qui consiste à féliciter les bonnes actions du gouvernement et en même temps avoir un regard critique là où c'est moins bien.
Bertrand HOUANHO