Sorties déchirées et affaiblies de la dernière élection présidentielle, les Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) ont refait surface sur l’échiquier politique national à travers l’organisation de leur Conseil national, samedi 03 décembre 2016. Mais la messe n’a pas servi à grand-chose
Pour une première sortie après le scrutin présidentiel, plusieurs barons du régime défunt étaient de cette messe pour se réclamer de l’opposition et porter leurs regards sévères sur la politique des nouvelles autorités du pays. C’est leur droit, et cela relève du jeu démocratique. Car, dans un Etat de droit, reprocher à l’autre ce qu’il fait de mal fait partie du jeu démocratique et enrichit les débats. Mais, l’exercice auquel s’est livrée l’alliance samedi dernier n’est nullement un débat d’idées. Il s’agit d’une sortie pour signifier que les Fcbe ne sont pas encore mortes, histoire de faire mentir les pronostics des observateurs. En effet, beaucoup avaient prédit qu’elles disparaîtront après les années Yayi, car tel fut le cas avec L’Ubf, après le règne de Kérékou I et II. En fait, le peuple attendait mieux, vu qu’une grande partie de l’opinion est d’avis pour que le régime actuel enquête sur les méfaits du passé, notamment sous le règne des Fcbe. Le scandale de la Ségub suivi avec intérêt et attention a déjà révélé la magouille et la dilapidation de deniers publics sous leur règne. Les fautifs en cause ont été mis en demeure de rembourser les sous indument perçus. Dans ce dossier où plusieurs barons et amis Fcbe ont été placés sous contrôle judiciaire, le chef de l’Etat a marqué des points. Il a reçu le soutien de plusieurs acteurs de la Société civile à poursuivre ce travail afin de faire rendre gorge. Comme l’enseigne l’adage, avant de balayer la cour du voisin, il faut d’abord balayer devant sa maison. En plus. Les scandales comme Icc-Services, le siège de l’Assemblée nationale, Ppea II, machines agricoles, concours frauduleux….ne les mettent pas à l’abri d’éventuelles poursuites. Ces dossiers constituent un miroir baromètre dans lequel, les barons Fcbe doivent se regarder avant de critiquer la gouvernance actuelle qui fait son œuvre pour redresser un pays qu’elles ont laissé dans un chaos indescriptible. C’est pourquoi, plutôt que de transformer la tribune de leur conseil national en un tribunal pour juger la gouvernance Talon, les membres de l’Alliance feraient mieux de regarder dans le rétroviseur. De même, les Fcbe plus que jamais en proie à des dissensions, des contradictions internes et à une véritable guerre de leadership, ne regardent plus dans la même direction et ne défendent plus les mêmes intérêts. Les choses ont commencé par se gâter depuis la veille de la présidentielle où vers la fin de son deuxième et dernier mandat, le leader de l’Alliance est livré à des critiques internes de ses partisans suivies de nombreux départs. L’un après l’autre, Chabi Sika, Marcel de Souza, Alexandre Hountondji, des proches considérés comme des caciques tournent dos au pouvoir. La crise déjà profonde s’est aggravée avec la cooptation par Yayi Boni du candidat Lionel Zinsou et son échec à la présidentielle. Un choix du chef de l’Etat qui a exaspéré la colère et poussé des barons à sortir de leur mutisme pour fustiger ce diktat du président « dribbleur ». Nassirou Bako Arifari, François Abiola, Komi Koutché, Barthélémy Kassa, qui rêvaient d’être le porte étendard des Fcbe à la présidentielle n’ont pas eu ce privilège. Ils n’ont pas digéré cette trahison de Yayi Boni.
Le miroir baromètre
Après cette succession de faits qui ont fragilisé l’alliance, certains ténors, des députés en l’occurrence, hier alliés dociles et obéissants, montrent désormais un nouveau visage et tiennent un discours qui les rapproche du Nouveau départ. Ainsi, le conclave de Grand-Popo organisé en juillet 2016 par les députés Fcbe et quelques alliés a livré à l’opinion publique une copie conforme à la nouvelle option envisagée par certains, mais aussi, il a révélé l’existence d’une aile dure qui ne partage pas les idéaux du nouveau régime. On a pu relever entre le communiqué final lu par Barthélémy Kassa et la réaction de André Okounlola, quelques éléments de divergence de points de vue. A l’Assemblée nationale, les groupes parlementaires qui étaient composés essentiellement des députés Fcbe et de partis alliés n’ont pas survécu à l’effet contagieux de l’avènement d’un nouveau pouvoir. Ils ont volé en éclats avant d’être reconstitués avec à leurs têtes, des représentants du peuple considérés comme des modérés ou déjà proches du pouvoir. C’est le cas de Rachidi Gbadamassi ou encore de Barthélémy Kassa. Une recomposition qui a échappé à la Coordination de l’Alliance et du Coordonnateur Eugêne Azatassou, qui, visiblement, ne contrôle ou n’a jamais rien contrôlé. Le navire Cauris lance toujours des signes de détresse et ce cliché n’a pas manqué de transparaître sur le Conseil national tenu samedi 03 décembre 2016. Ce rendez-vous, loin de montrer l’unité retrouvée des différents clans, a révélé l’isolement de certains barons qui sont restés à l’écart en déclinant l’invitation, mais aussi a fait resurgir les ressentiments du passé. C’est d’ailleurs dans ce contexte qu’il faut placer l’intervention de l’ancien ministre d’Etat, François Abiola, qui a craché crûment la vérité lors de ce conseil national. Le professeur d’université a fait allusion à ce qui s’est passé lors de la présidentielle au sujet du choix du candidat du régime défunt. Il s’est dit convaincu que si on leur avait laissé la possibilité de choisir eux-mêmes leur candidat, les choses se seraient passées autrement. Homme politique averti, François Abiola, collaborateur docile de Yayi Boni, a fait une parenthèse sur la manière dont les Fcbe étaient gérées. Il a lâché que c’est le moment pour le Conseil national permette d’échanger sur la liberté d’expression et d’opinion au sein des Fcbe. En somme, les maux des errances des Fcbe sont connus et déclinés. Mais le Conseil est passé à côté de tout cela.
FN