Une prévision de plus de 2010 milliards pour le budget de l’Etat exercice 2017. C’est ce que les députés s’apprêtent à voter la semaine prochaine. Cette ambition du gouvernement de la Rupture intervient dans un contexte morose aggravé par les réformes de Muhammadu Buhari pour juguler la crise du naïra.
A la dépréciation du naïra, un coup dur pour le commerce de véhicules d’occasion, vient s’ajouter l’interdiction à partir du 1er janvier 2017 de l’exportation par voie terrestre de véhicules neufs ou d’occasion sur le sol nigérian. Cette mesure combien surprenante vient en rajouter aux déboires des importateurs de véhicules d’occasion. A Sèkandji, c’est la désolation et l’incertitude qui règnent dans le rang de ceux quinourrissaient encore l’espoir d’une renaissance de cette filière. Beaucoup de Libanais ont déjà plié bagage et pour ceux qui sont restés, l’horizon s’assombrit davantage. Cette situation ne sera pas sans conséquence sur le trésor public. La filière véhicules d’occasion permettait de renflouer les caisses de l’Etat. Le Chef de l’Etat en doublant le budget n’avait sans doute pas pensé que le Grand voisin de l’Est allait fermer ces frontières à cette manne nationale que représente la filière véhicules d’occasion.
Plus de 700 km de frontière et comment ne pas en profiter ?
Depuis toujours toutes les politiques économiques se basent sur le profit que le Bénin pouvait tirer de sa proximité avec le Nigeria qui représente un marché de plus de 200 millions d’habitants. Mais la crise du pétrole a obligé le gouvernement nigérian a entamé une série de réformes. Déjà interdiction est faite d’amener sur le sol nigérian les produits issus de la réexportation. C’était alors difficile pour les opérateurs économiques béninois qui en majorité sont dans la réexportation. Et comme cela ne suffisait pas, il fallait que Buhari aille plus loin en s’intéressant à la filière véhicules d’occasion. Or, 75% des véhicules d’occasion que le Bénin importe vont sur le marché nigérian. Si ce marché n’existe plus en 2017, l’importation de véhicules va considérablement baisser et donc les différentes taxes sur les véhicules vont connaître une baisse drastique. Dans ce contexte, par quelle alchimie, le gouvernement de la Rupture pourra réunir les 2010 milliards de prévision budgétaire ? Soit le Chef de l’Etat revoit ses ambitions à la baisse pendant qu’il est encore temps, soit il prend son bâton de pèlerin pour aller parler avec son homologue nigérian de la conséquence d’une telle décision sur l’économie béninoise dans un contexte régional de libre circulation des personnes et des biens.
Certes, ces réformes du Nigeria devraient amener les opérateurs économiques béninois à s’investir dans la transformation des produits locaux. Le Nigeria ne veut pas qu’on investisse son marché de produits fabriqués dans les pays d’Europe, d’Asie ou d’Amérique. C’est l’occasion de promouvoir le label « Made in Bénin ». Mais cela n’est valable que pour les produits agricoles. Les véhicules d’occasion, c’est tout autre chose. Combien de pays africains fabriquent des voitures ? C’est en cela que le président Talon doit s’investir pour amener Muhammadu Buhari à revoir sa copie.
Bertrand HOUANHO