Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratiques    Le Mali    Publicité
aCotonou.com NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article
Société

Poursuivi pour meurtre (Cour d’assises /16e dossier): Roger Lantoedjra recouvre la liberté après sept ans quatre mois de détention
Publié le mardi 13 decembre 2016  |  La Nation
Le
© Autre presse par DR
Le palais de justice de Cotonou




Dans le cadre de l’examen de la 16e affaire inscrite au rôle qui passait lundi 12 décembre, la cour d’assises de la cour d’appel de Cotonou s’est penchée sur le cas de l’accusé Roger Lantoedjra poursuivi pour meurtre. Au terme de la procédure de jugement, l’accusé reconnu coupable des faits mis à sa charge a été condamné à sept ans de travaux forcés. Il recouvre la liberté pour avoir déjà passé sept ans quatre mois de détention préventive.

Les faits remontent au jeudi 13 septembre 2001. Dans l’après-midi de ce jour, à Adjati, arrondissement de Honvié, commune d’Adjarra, le nommé Roger Lantoedjra de retour à la maison, est informé par sa mère des réprimandes qu’elles avait essuyées de la part de Oké Mikinhouessé qui la soupçonnait d’être l’auteur des ordures, notamment des matières fécales et des débris de bouteilles jetés dans son champ sis à côté de leur maison. Pris de colère, Roger Lantoedjra se serait rendu dans le champ où Oké Mikinhouessé vaquait à ses travaux champêtres pour lui faire des remontrances. C’est dans ces circonstances qu’est survenue une altercation au cours de laquelle Oké Mikinhouessé a réussi à repousser Roger Lantoedjra en le menaçant avec ses houe et coupe-coupe. Roger Lantoedjra serait retourné à son domicile pour s’emparer d’un couteau et serait revenu sur les lieux où il a poignardé à deux reprises Oké Mikinhouessé à la poitrine. Transporté pour des soins à l’hôpital, celui-ci rendit l’âme en cours de chemin. L’autopsie pratiquée sur le corps de la victime fait état d’un décès consécutif à une atteinte de l’un des vaisseaux magistraux du cœur causée par une arme blanche.
Déposant à la barre, Roger Lantoedjra reconnaît les faits. Mais il dit avoir précisé à son oncle que ce n’est pas eux seuls qui jetaient les ordures dans le champ. « Il m’a menacé mais je lui ai dit que je ne suis pas venu pour la bagarre », relate-t-il. Je reconnais, poursuit Roger Lantoedjra, que je lui ai porté deux coups de coupe-coupe à la poitrine; il saignait et c’est d’un seul tenant que je lui ai porté les deux coups. « Il m’a pourchassé et j’ai fermé la porte après moi quand les gendarmes sont venus me chercher. J’étais au violon à la brigade lorsqu’on m’a annoncé que celui que j’ai poignardé est mort », explique-t-il.
Sur les questions de la défense, il réaffirme avoir réagi en retirant le coupe-coupe des mains de son oncle. « Après avoir été poussé, je ne peux pas choisir de porter les coups à la poitrine, car c’est une partie sensible ; c’est en se débattant qu’il a reçu les coups », justifie Roger Lantoedjra.
Le témoin Moussa Mikinhouessè explique qu’il était témoin oculaire des faits. La mère de l’accusé, relate-t-il, aurait lancé des matières fécales par-dessus le mur de séparation, ce qui a irrité mon frère qui s’est porté vers elle pour lui demander de venir voir. Après, une altercation s’en est suivie entre la victime et l’accusé ; ce dernier l’a poignardé avec un couteau à double tranchant. Il y a eu deux fois altercations, indique-t-il. Pour la première fois, explique-t-il, les voisins sont venus les séparer ; c’est la deuxième fois que le drame est survenu et l’accusé est sorti avec un couteau.

La partie civile remet tout à Dieu

Confronté au témoin, l’accusé explique que le jour où la scène s’est produite, Moussa n’était pas là. « Sinon il nous aurait séparés », souligne l’accusé.
La partie civile interrogée déclare ne rien réclamer et tout remettre à Dieu.
Le président demande à la partie poursuivante et à la défense d’indiquer les pièces dont ils souhaitent la lecture.
Le ministère public décline l’offre pendant que la défense souhaite la lecture des demandes de mise en liberté des 26 mars 2005 et 18 décembre 2005 et du procès-verbal d’interrogatoire au fond du 25 janvier 2002. L’accusé y a déclaré ce qu’il a soutenu à la barre. Tandis que dans les demandes de mise en liberté, il insinue qu’il était sous l’emprise d’une force extérieure qui l’aurait poussé à mal agir.
D’après l’expertise médico-psychologique et psychiatrique, l’accusé jouissait de toutes ses facultés mentales, son bulletin n°1 ne porte mention d’aucune condamnation. L’enquête de moralité lui est défavorable.
Et le représentant du ministère public, Marie Josée Patinvoh, d’enclencher avec ses réquisitions. Un moment de patience peut préserver d’un grand malheur et un moment d’impatience entraine le désastre, retient-elle. Elle rappelle les faits. Le rapport d’expertise médico-légal a conclu à l’ampleur de la plaie issue de la bagarre, explique Marie Josée Patinvoh. Tant à l’enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur, il a reconnu les faits mais a précisé qu’il n’avait pas l’intention de donner la mort, argumente-t-elle.
Est qualifié meurtre, l’homicide commis volontairement ; ce qui suppose, avance-t-elle, une victime humaine et un acte visant à donner la mort. L’acte doit être positif et matériel, poursuit-elle. « Il est allé chercher un couteau pour passer à l’offensive », souligne Marie-Josée Patinvoh.
L’acte d’homicide est effectif s’il y a intention de donner la mort avec conscience de l’effet qui suivra, explique-t-elle. Comment comprendre le fait pour l’accusé d’aller chercher le couteau pour revenir vers son oncle et comment comprendre la localisation anatomique de la blessure ?, s’interroge le ministère public. Elle s’en remet aux conclusions du certificat médical d’examen du cujus et cite : « L’autopsie fait état d’un décès consécutif à une atteinte de l’un des vaisseaux magistraux du cœur causée par une arme blanche ». L’accusé, poursuit-elle, n’ignore pas la vitalité de la partie qu’il a visée. Pourquoi pas les pieds ou une autre partie moins vitale ou sensible ?, s’interroge-telle.

Meurtre constitué

Il en résulte que le meurtre est constitué au regard des articles 295 et 304 du code pénal, déduit le ministère public. Marie-Josée Patinvoh pense que les faits justificatifs ou la légitime défense ne pourraient être invoqués pour elle. L’accusé, relève l’avocat général, est accessible à la sanction pénale, vu les pièces du dossier. L’accusé peut-il bénéficier de circonstances atténuantes ou de l’excuse absolutoire ? Marie-Josée Patinvoh les écarte, ajoutant que l’enquête de moralité lui est défavorable et que l’intéressé fait usage du chanvre indien. « Je requiers de retenir contre lui le crime de meurtre et de le condamner au temps passé en détention », laisse entendre Marie-Josée Patinvoh.
Ce que réfute la défense assurée par Me Rodrigue Bidossessi Saturnin Agbanni. C’est toujours avec un cœur meurtri, avance l’avocat, que de venir aux assises pour des dossiers de ce genre. L’accusé, soutient-il, n’a pas adopté avec la cour, la tenue normale. René Floriot a déclaré que la fatalité peut vous amener à rendre compte devant les juridictions quel que soit votre statut, cite le conseil. « Je m’incline devant la mémoire de la victime. C’est l’oncle de l’accusé. On ne peut pas délibérément décider de décimer sa famille », déclare-t-il. S’appesantissant sur les faits qu’il a rappelés, il a relevé que son client a reçu un coup de coupe-coupe au bras et qu’il a réagi. Il relève qu’il a bénéficié d’une liberté provisoire le 21 janvier 2009.
Revenant aux faits, il soutient que le meurtre suppose la destruction volontaire de la vie d’un homme par un autre homme. Il déclare s’être interrogé sur la particularité du dossier en examen et sur l’attitude du représentant du ministère public à faire dire à l’accusé ce qu’il n’a pas fait. Le meurtre, rappelle la défense, suppose une intention et il n’y a pas intention ici, soutient-il. Personne n’a pu démontrer que ces blessures pouvaient être faites par un coupe-coupe. Dans la violence des coups, un geste fatal peut survenir. « Lorsqu’on bâcle l’enquête préliminaire, la tâche est compliquée pour vous », relève la défense qui déplore que les objets supposés du crime n’aient pas été mis sous scellés. Le traitement dont l’accusé a été l’objet, ne plaît pas à la défense. « Je ne plaiderai pas la légitime défense, car il a le cœur meurtri et émet des regrets pour avoir porté un coup fatal à son oncle », indique-t-il. Il a proposé à la cour de requalifier les faits poursuivis en coups mortels. « Je ne tiens pas à l’innocenter ; Oké est parti. Mais l’accusé vit avec une sonde », informe-t-il. Et l’accusé, relève-t-il, a expliqué avec regret que son oncle lui a donné un coup de coupe-coupe. « Il a dit plusieurs fois : je n’étais pas dans la logique de venger ma mère ; aujourd’hui, qu’est-ce qui reste de lui ? Le témoin a essayé de le charger. On le peint en noir mais il a la conscience gênée », relève la défense.

Verdict

« L’important c’est de sortir celui qui est là de prison », demande la défense. Le témoin, indique-t-il, n’a jamais été sur les lieux du crime ; j’aurais pu faire de la procédure mais il faut sortir l’accusé, relève-t-il encore. « Il y a un cas de conscience à examiner; dans cette noirceur, je voudrais que vous puissiez le blanchir. Il a une sonde qu’il traîne. Ne le condamnez pas davantage, j’ai dit », plaide-t-il.
Lors de la délibération, la cour a déclaré Roger Lantoedjra coupable d’avoir le 13 septembre 2007 volontairement commis un homicide sur la personne d’Oké Mikinhouessé, faits prévus et punis par les articles 295 et 304 du code pénal. Elle le condamne en conséquence à la peine de sept ans de travaux forcés et aux frais de justice, le dispense de l’interdiction de séjour et ordonne la destruction des objets mis sous scellés. Ayant donc déjà passé sept ans quatre mois en détention, il retourne se soigner. Ce qui contente son avocat et satisfait autant le ministère public.
Pour juger cette affaire, les jurés Clarisse Houngbédji, Thierry Tente Vinou, Jonas Montcho et Féréol Coffi Hounkponou ont soutenu le président de céans Jacques M. Hounsou assisté de Cyprien Tchibozo et Edibayo Joanna Dassoundo. La mémoire de l’audience a été assurée par Edouard Zavonon. Le ministère public a nom Marie-Josée Patinvoh.
Ce matin, la cour connaîtra de deux dossiers. Bénédicte Ahizimè est poursuivie pour avortement, coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner pendant que Bernard H. Atinnehekpon, Sourou Agossou et Nounagnon Toninhekpon alias Zokito devront répondre des faits de coups mortels, violences et voies de fait mis à leurs charges?


Didier Pascal DOGUE
Commentaires