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Dieudonné Lokossou, ex-secrétaire général de la CSA-Bénin: « Le syndicalisme ne doit pas être un effet de hasard »
Publié le vendredi 6 janvier 2017  |  La Nation
Dieudonné
© aCotonou.com par CODIAS
Dieudonné Lokossou, le Secrétaire général de la CSA-Bénin lors de la Conference de presse des centrales et confédérations syndicales sur l`actualité nationale au Bénin.
Cotonou 12 Août, Bourse du travail. La CGTB, CSA Bénin, COSI Bénin se prononce sur les dossiers de l`OCBN, la révision de la constitution et autres actualités nationales.




Après deux mandats au secrétariat général de la Confédération générale des syndicats autonomes du Bénin (CSA-Bénin), Dieudonné Lokossou part laissant place à Anselme Amoussou qui a été élu au dernier congrès ordinaire de la confédération. Pour le désormais ancien secrétaire général de la CSA-Bénin, ce n’est pas forcément celui qui parle beaucoup qui est le meilleur syndicaliste. Le syndicalisme à son avis, ne doit pas être un effet de hasard, ni une affaire des aventuriers, et non plus une affaire d’ambition personnelle inassouvie. Il est plutôt une mission patriotique.

La Nation : Dieudonné Lokossou, le dernier congrès de la Confédération des syndicats autonomes du Bénin vient d’élire Anselme Amoussou pour vous succéder. Qu’est-ce qu’on peut retenir des 10 ans que vous avez passés à la tête de la confédération ?

Dieudonné Lokossou : Une décennie à la tête d’une confédération, ce n’est pas chose facile. Mes deux mandats ont connu des hauts et des bas. Lorsque vous décidez en toute responsabilité de vous engager pour une cause, comme celle-là, on s’attend à tout. Donc, je n’ai pas été surpris outre mesure pendant ces 10 années tumultueuses de mes deux mandats. Mais ce que je retiens comme grand souvenir, c’est d’avoir côtoyé beaucoup de citoyens travailleurs, chômeurs, politiciens véreux. J’ai évolué dans tout ce monde ondoyant. J’ai essayé avec ma force et mon intelligence avec le soutien du grand architecte de l’univers à régler tant bien que mal les problèmes de grande misère et de grande précarité qui assaillaient les plus démunis. Je ne peux pas avoir la prétention d’avoir réglé tous les problèmes. Parce qu’il s’agit ici de défendre des causes.

Quels sont concrètement les problèmes que vous avez réglés au cours des deux mandats ?

Si nous prenons l’exemple de la privatisation des sociétés d’Etat, nous avons eu à entrer en négociation pour plusieurs cas. Je peux citer le cas de la Société nationale de commercialisation des produits pétroliers (Sonacop) comme beaucoup d’autres. Il y a eu aussi le problème des reversements, des problèmes de recrutement. Il s’agit ici des agents de la Fonction publique de divers secteurs. La lutte pour le relèvement du point d’indice de 1,25 où les enseignants ont été arbitrairement exclus. Tous ces éléments ont fait partie de notre combat. Quand je dis que nous avons réussi, souvent on le fait seul ou avec les autres confédérations. Ce qui m’a frappé le plus en tant qu’amoureux des libertés, c’est la restriction drastique et exagérée des libertés d’expression, des libertés démocratiques et la violation des droits de l’Homme par les régimes qui se sont succédé jusqu’à ce jour. Je ne peux pas dire que nous avons réussi sur toute la ligne. On a connu des échecs et des succès.
S’agissant du secteur privé, quand j’étais arrivé, le Salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) tournait autour de 21 000 FCFA. Après, cela a été porté à 25 000 ; 27 000 ; 31 650 jusqu’à ce qu’on soit aujourd’hui à 40 000. Même si les gens ne l’appliquent pas, c’est déjà un acquis.

Quels sont les événements qui vous ont le plus marqué pendant les deux mandats ?

Ce qui m’a vraiment marqué de façon négative, c’est la disparition ou l’enlèvement de certains citoyens qu’on n’a plus jamais retrouvé. Deuxième élément sur ce chapitre, c’est l’organisation par un groupe de la captation des ressources financières, la destruction de l’économie et des foyers. Je veux parler de l’affaire ICC-services. Il y a également tant d’autres scandales qui ont été couverts par les régimes successifs. Je ne veux pas parler de la lutte contre la corruption.
Le point culminant de la violation des libertés est à la suite de l’attentat avorté contre la personne du président de l’ONG Alcrer, Martin Assogba. Nous avons estimé que c’était un abus. A la suite d’une assemblée générale nous avons décidé de faire une marche pacifique de protestation. Le préfet d’alors a fait débarquer une horde de policiers et de gendarmes armés jusqu’aux dents. C’était le 27 décembre 2013 où on a utilisé des armes comme des gaz lacrymogènes qu’on a lancées sur les personnes physiques des travailleurs qui ont été vraiment blessés. Je retiens aussi que j’ai opéré dans un milieu vraiment ingrat. Vous n’êtes bien avec les travailleurs, encore moins avec les employeurs. Beaucoup de suspicions qui rendent la tâche difficile.

Quels sont ces genres de suspicions ?

Parlant de suspicions, il y en a beaucoup. Il y a des politiciens qui suscitent ça. Il y a des moments extrêmement difficiles. Mais comme on est nanti d’un mandat et comme on sait qu’il prendra fin un jour, on s’est résolu à ne pas décevoir les travailleurs. Parce que si on démissionne, on peut se livrer à des spéculations. Nous sommes dans un pays où l’argent est roi. On pense que toutes les relations sont basées sur l’argent. On pense que sans argent, celui qui est commis à une tâche ne peut pas le faire convenablement.

Vous partez avec toutes ces expériences. Quels conseils avez-vous à l’endroit de la relève ?

La première chose que je dois apprendre à ceux qui doivent prendre le flambeau, c’est l’humilité, le respect des engagements, le respect de soi-même et le respect de l’interlocuteur. Le syndicat n’est pas une épée de Damoclès qu’il faut suspendre à la tête de l’employeur pour l’effrayer. Il faut respecter certains principes cardinaux. Il faut respecter des règles qui régissent le mouvement syndical. Lorsqu’on est en conflit ouvert avec l’employeur, il y a des étapes. Il y a la négociation, le sit-in, les meetings, les marches de protestations, la grève qui n’est que l’ultime étape. Un syndicaliste ne doit pas se mettre en grève pour un oui ou un non. Il doit pouvoir contrôler ses sens et éviter le folklore. Ce n’est pas forcément celui qui parle beaucoup qui est le meilleur syndicaliste. Il faut raisonner. Le syndicalisme ne doit pas être un effet de hasard. Ce n’est pas une affaire des aventuriers, ce n’est pas une affaire d’ambition personnelle inassouvie mais plutôt une mission patriotique. Je pense que les anciens constituent des bibliothèques sur le plan syndical.

Avez-vous un mot à l’endroit des travailleurs?

C’est à l’endroit de ceux qui pensaient qu’on est ici pour l’éternité. Ils viennent de constater que non. C’est au niveau des partis politiques que les gens ne veulent pas partir.
En effet, quand on prend ces partis politiques, il y a des gens plus âgés que nous mais qui les dirigent. Mais cela ne heurte aucune conscience comme c’est les oiseaux du même plumage. Je veux juste dire que le départ de Dieudonné Lokossou n’arrête pas le combat. Les gens vont continuer par défendre les intérêts du peuple et des travailleurs. Et je serai toujours à leurs côtés.
Quand il y a guerre, on sollicite toujours les anciens combattants. Si je suis sollicité, je répondrai. Mais ce ne sera pas pour prendre les armes de la main de ceux qui sont là. Il faut qu’il y ait une autonomie d’action. Sinon c’est comme si on n’est pas parti?

Propos recueillis par Bruno SEWADE
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