L’Assemblée nationale a renoué depuis ce jeudi 5 janvier avec l’examen des dossiers relatifs au contrôle de l’action gouvernementale. Quatre questions orales avec débat ont été débattues après les réponses des ministres sectoriels aux députés.
La question de la transhumance pastorale au Bénin a été le premier dossier examiné par l’Assemblée nationale. Celle-ci émane du député Moukaram Adjigbadé Koussonda qui a dénoncé les problèmes auxquels sont confrontées certaines populations, notamment de Pobè, victimes des violences souvent avec des morts d’hommes de la part des éleveurs transhumants du Niger et du Nigeria. La réponse du Gouvernement a été apportée par le ministre chargé de l’Agriculture, Delphin Koudandé. La gestion de la transhumance est une préoccupation pour le Gouvernement, assure-t-il. Cette pratique pastorale qui consiste en un mouvement saisonnier des animaux à la recherche de pâturage et d’eau pour assurer la survie de leur bétail, est au-delà de son caractère culturel, devenue une pratique imposée principalement par la variabilité du climat et les risques climatiques. Pour éviter que cette transhumance soit pratiquée sur fond de tensions, certaines dispositions législatives, réglementaires, techniques sont prises.
Le cadre législatif et réglementaire qui régit actuellement la transhumance au Bénin ne permet pas de contenir les conflits et de protéger les populations, a avoué le ministre. Mais le Gouvernement n’est pas resté les bras croisés face au phénomène, souligne-t-il. A cet effet, un Code pastoral et un Code de l’élevage sont en cours d’élaboration pour assurer une meilleure gestion de cette activité, poursuit le ministre. Ainsi, un arrêté interministériel portant création des portes d’entrée des bovins transhumants, a-t-il été signé, il y a trois semaines et modifié mercredi 4 janvier dernier où toutes redevances taxes et cautions ont été supprimées. Par rapport aux dispositions techniques, des comités d’orientation des transhumants sont installés, les couloirs de passage des animaux sont tracés et balisés et des postes de contrôle sont installés au niveau des communes frontalières. A titre d’exemple, avec le projet d’appui aux filières lait et viande (Pafilav) il a été signé le 8 avril 2013 avec le Consortium des organisations non gouvernementales (SNV-APIDEV-API), deux conventions dont l’une relative à l’exécution du volet matérialisation et balisage de 1000 km de parcours et couloirs de passage des animaux et l’autre relative à l’aménagement de 10 000 ha de parcours naturel dans la zone d’intervention du projet.
La matérialisation de ces parcours et couloirs de passage et l’aménagement des parcours par le projet devraient améliorer l’accès du bétail aux ressources pastorales disponibles et réduire les conflits récurrents entre éleveurs et agriculteurs, a expliqué Delphin Koudandé. En dehors du tracé et du balisage des couloirs de passage et des aménagements des parcours, des études agropastorales et des plans d’aménagement des espaces agropastoraux ont été réalisés au niveau de 32 communes. L’objectif visé est de proposer aux communes visées, des plans de gestion durable des espaces agropastoraux avec une attention particulièrement aux zones reconnues comme étant des zones d’accueil ou zone de pâturage, afin de contribuer à la réduction des conflits entre éleveurs et agriculteurs. Ces plans qui peuvent servir dans l’élaboration du PDC nouvelle génération nécessitent par leur mise en œuvre, les ressources conséquentes par chacune des communes. Les activités de sensibilisation sont organisées au profit des agriculteurs, éleveurs, transhumants pour une gestion apaisée et bénéfique de la transhumance, a insisté Delphin Koudandé.
Le ministre en charge des Relations avec les Institutions, Joseph Djogbénou, a annoncé l’organisation prochaine d’une communication sur le dossier pour mieux faire cerner aux députés les mesures envisagées par le Gouvernement pour la maîtrise de ce phénomène. Mais cette réponse du Gouvernement n’a pas convaincu les députés, surtout l’auteur de la question, Moukaram Adjibadé Koussondé. Ils constatent qu’il n’y a pas eu d’avancée sur le domaine depuis une trentaine d’années. La question de transhumance de façon récurrente revient à chaque législature. Le comble est que jusqu’ici aucune réponse durable n’a été trouvée. Les députés ont recommandé la mise sur pied en urgence d’un comité composé notamment d’élus locaux, de députés et des membres du Gouvernement pour trouver la thérapie de choc devant permettre d’encadrer la transhumance transfrontalière sur le terrain.
La relance de la filière palmier à huile débattue
Les difficultés de la filière palmier à huile avec en toile de fond la situation des Coopératives d’aménagement rural (CAR) et les Unions régionales des Coopératives d’aménagement rural (URCAR) étaient aussi en débat à l’Assemblée nationale. C’est une question orale avec débats initiée par le député Dakpè Sossou. Selon le ministre chargé de l’Agriculture, dans sa réponse aux députés, l’Etat ne gère plus les CAR et leurs URCAR. Les structures de l’Etat, chacune selon les attributions, le plus souvent à la demande des acteurs, apportent leur assistance-conseil pour le fonctionnement desdites organisations. Pour ce qui concerne les CAR, Dephin Koudandé fait savoir qu’à ce jour plus de 80% des coopérateurs membres fondateurs desdites CAR sont décédées.
« Ce ne sont donc pas les vrais acteurs qui entretiennent la crise sur les CAR », affirme-t-il. C’est donc pour corriger cette situation que le gouvernement du Bénin a prévu par relevé de Conseil des ministres en date de juin 2014, l’actualisation des registres des CAR en vue de l’organisation des assemblées générales crédibles et apaisées et relancer la filière palmier à huile sur des nouvelles bases. Compte tenu du recentrage du rôle de l’Etat dans ses fonctions régaliennes notamment le contrôle et la coordination, la reprise de la gestion des CAR par l’Etat ne devra pas être une option pertinente, explique le ministre.
Toutefois, l’Etat peut revoir avec les acteurs, l’amélioration du modèle de gestion desdites coopératives. Il est prévu néanmoins que des mesures d’accompagnement seront poursuivies dans les pôles de développement couverts par cette culture aux fins d’améliorer les performances de la filière qui, devra être capable de contribuer de façon durable à la souveraineté alimentaire et nutritionnelle et au développement économique et social au Bénin. Il s’agit de mettre en œuvre des actions stratégiques inscrites dans le Programme de relance de la filière palmier à huile au Bénin élaboré en 2014.
« Ces actions vont permettre d’assurer la disponibilité des plants sélectionnés tolérants à la sécheresse, le partenariat public-privé pour la fourniture de services, la sécurisation des investissements dans la filière, la facilitation de l’accès au financement adopté, la professionnalisation des organisations des acteurs des différents maillons de la filière, la diversification des produits de la filière palmier à huile et l’amélioration de l’accès au marché », annonce le ministre Koudandé.
Les députés n’ont pas été satisfaits de cette réponse du Gouvernement qui semble reléguer au second rang la filière palmier à huile, selon eux. Ils ont suggéré au Parlement de mettre à la disposition du Parlement un plan d’urgence à partir d’une étude révélée sur la place de la filière palmier à huile au Bénin. Laquelle étude doit prendre en compte la crise dans les Car et URCAR pour une relance véritable de cette filière.
Une commission d’enquête sur l’affaire Maria Gléta
Toujours au cours de la séance plénière d’hier, les députés se sont penchés sur l’affaire de la centrale thermique de Maria Gléta. Un chantier qui a coûté près de 50 milliards F CFA financés par le Gouvernement du président Boni Yayi. Malheureusement jusqu’ici, ce projet peine à donner satisfaction. La quantité d’énergie produite par les huit turbines à gaz installées est très loin d’atteindre les 80 Mgtts prévus. Ce qui a poussé les députés à, une fois encore, interpeller le Gouvernement du président Patrice Talon pour comprendre la situation de cette centrale thermique. La réponse de l’Exécutif a été donnée par le ministre en charge de l’Energie, Jean-Claude Houssou. Il a demandé aux députés que l’heure n’est pas à regarder dans le rétroviseur. L’essentiel aujourd’hui est de chercher à trouver les voies et moyens pour renforcer la production énergétique du Bénin pour le rendre tant soit peu autonome. Ces éléments de réponses ont été jugés dangereux par la plupart des députés qui sont intervenus sur le dossier. Non satisfaits, ils ont préconisé la création d’une commission d’enquête parlementaire pour faire la lumière sur ce dossier, rechercher les auteurs de ce scandale et leur faire rembourser les 50 milliards F CFA engloutis sur le chantier.
Outre ce dossier, les parlementaires ont examiné une autre question orale avec débat émanant encore de Dakpè Sossou. Elle est relative au dossier de blocage du chantier de construction du nouveau siège de l’Assemblée nationale.