Dakar - Le président élu gambien Adama Barrow, auquel le président sortant Yahya Jammeh refuse de céder le pouvoir, a été accueilli dimanche au Sénégal voisin "jusqu’à son investiture prochaine", officiellement prévue jeudi.
La Gambie est plongée dans une grave crise depuis que M. Jammeh a annoncé
le 9 décembre qu’il ne reconnaissait plus les résultats de l’élection présidentielle du 1er décembre, une semaine après avoir pourtant félicité M. Barrow pour sa victoire.
Yahya Jammeh dirige sans partage depuis 1994 ce petit pays anglophone d’Afrique de l’Ouest de moins de deux millions d’habitants. Son mandat expire
mercredi prochain. De son côté, M. Barrow a assuré qu’il sera investi jeudi et se considèrera président à compter de cette date.
Samedi, un mini-sommet sur cette crise gambienne s’est tenu dans la capitale malienne Bamako en marge du 27ème sommet Afrique-France, réunissant notamment M. Barrow et les dirigeants nigérian Muhammadu Buhari, libérien
Ellen Johnson Sirleaf ainsi que l’ex-président ghanéen John Dramani Mahama.
Une source de la présidence sénégalaise a confirmé dimanche à l’AFP que M. Barrow se trouve dans la capitale sénégalaise Dakar à la suite de consultations avec des responsables de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), en marge de ce sommet de Bamako.
"M. Barrow est à Dakar depuis dimanche" très tôt, rapporte l’Agence de presse sénégalaise (APS), citant une source officielle. "Le président de la République du Sénégal (Macky Sall, ndlr) a répondu favorablement à la demande de son homologue du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf", présidente en exercice de la Cédéao, "en marge du sommet France-Afrique", selon l’agence.
Mme Sirleaf, qui avait fait le déplacement à Bamako en compagnie du président élu de la Gambie, "a demandé au chef de l’Etat sénégalais d’accueillir Adama Barrow jusqu’à son investiture prochaine, ce qu’a accepté Macky Sall +au nom de l’hospitalité sénégalaise+", ajoute l’APS.
- Des milliers de Gambiens fuient le pays -
Le climat d’incertitude en Gambie a récemment poussé des milliers de Gambiens à fuir le pays, en particulier vers le Sénégal, unique voisin terrestre de la Gambie, et la Guinée-Bissau, plus au sud.
Les personnes ayant fui au Sénégal ces deux dernières semaines sont
"principalement des enfants", selon le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), qui explique que beaucoup de parents "craignant des troubles potentiels" ont décidé d’évacuer leurs enfants dans ce pays.
Depuis son revirement, M. Jammeh subit de nombreuses pressions extérieures
et apparaît de plus en plus isolé. Il a saisi la justice pour faire annuler les résultats de la présidentielle et se dit déterminé à rester président tant qu’elle n’aura pas statué sur ses recours.
Ainsi jeudi, son avocat a déposé à la Cour suprême une nouvelle requête pour empêcher la prestation de serment de M. Barrow prévue jeudi prochain.
Une mission de la Cédéao (15 pays) s’est rendue à deux reprises dans la capitale gambienne Banjul pour convaincre M. Jammeh de céder le pouvoir sans heurts.
L’Union africaine (UA) l’a sommé pour sa part de quitter le pouvoir pacifiquement, le menaçant de "graves conséquences" dans le cas contraire et prévenant qu’elle ne le considérerait plus comme légitime à partir de jeudi.
Par ailleurs, de hauts responsables militaires de la Cédéao venant notamment du Sénégal, du Liberia et du Ghana se sont récemment réunis dans la capitale fédérale nigériane Abuja pour discuter de "l’impasse politique" en Gambie, selon l’Etat-major nigérian.
Au sommet Afrique-France de Bamako, le ministre ivoirien des Affaires étrangères Marcel Amon Tanoh a rappelé qu’un recours à la force n’était pas exclu.
Vendredi, le représentant de l’ONU en Afrique de l’Ouest, Mohamed Ibn Chambas, avait de son côté fait savoir que la Cédéao pourrait demander au Conseil de sécurité de l’ONU le déploiement de troupes en Gambie si M. Jammeh persistait à refuser de quitter le pouvoir.
La Cédéao n’a pas exclu une intervention militaire en dernier recours, mais l’armée nigériane a récemment nié des informations selon lesquelles elle préparait ses troupes à intervenir en Gambie.
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