Un coup de balaie et la moisson est inadmissible. 1331 militaires fictifs ! Comment a-t-on pu entretenir une telle mafia, qui a traversé le temps, résisté aux différents régimes qui se sont succédé au sommet de l’Etat ? Ce premier résultat de l’opération de recensement des agents de la fonction publique, lancée décembre dernier, est ahurissant. La caserne, bien qu’elle soit un lieu de réserve, a aussi une réputation de modèle de discipline où les vertus de citoyenneté, le sens du service de la patrie, sont inculqués aux ayants droits. Pourtant, le virus de la corruption a franchi toutes les barrières et met à mal les fondamentaux de la République. Les forces armées sont atteintes. Les chasseurs de fonctionnaires fictifs y ont fait une belle irruption, pour mettre à nue un crime économique savamment orchestré.
Sur une estimation de 25.759 agents, 23.352 sont enrôlés, 145 non recensés, 1331 positions inconnues, 200 et 731 agents respectivement en stage et en mission à l’étranger. Voilà le bilan établi par le cabinet militaire. Des agents inconnus de l’Etat, tapis dans les forces armées, qui perçoivent régulièrement leur salaire, leur prime, et tous les avantages dus à leur rang. Incroyable ! Sans aucun doute, c’est peut-être aussi ça le génie Béninois. En effet, il est du ressort de la Direction des services de l’intendance militaire, de produire le point des effectifs et des soldes au trésor public, de recevoir le montant correspondant et de procéder ensuite au payement des agents. C’est donc à ce niveau que la magie opère. Les agents fictifs gonflent les effectifs, et les caisses de l’Etat saignent. Ainsi, des milliards de francs sont détournés à chaque opération. Des militaires qui braquent la République. Quelle honte !
En tout cas, les responsabilités doivent être situées. Le gouvernement a le devoir d’aller plus loin. Tous les jours pour le voleur, un jour pour le propriétaire, dit l’adage populaire. Il faut auditer les fonds mis à la disposition de l’intendance militaire et faire rendre gorge aux fossoyeurs de l’économie nationale. Qu’ils soient en fonction ou déjà admis à la retraite, ils doivent répondre de leur crime, aussi bien au civil, qu’au pénal. Le ministre de la défense, Candide Azannaï a de la matière. Toutefois, après cette faille notée à l’intendance, il est peut-être temps, que l’Etat repense le mode de paiement des militaires. En dépit du fait que la caserne reste la caserne, il n’en demeure pas moins, que ces agents sont des fonctionnaires. Une chose est sûre, cette réforme sera indispensable si tant est que le gouvernement veut avoir une idée claire et précise de l’effectif des agents de la fonction publique. Vivement une nouvelle moisson de cette opération d’assainissement.
Arnaud DOUMANHOUN