Inculpé pour coups mortels, Bouyagui Orou Kpayi était, hier lundi 23 janvier 2017, à la barre pour le compte de la 5ème affaire au rôle de la Cour d’appel. Il a écopé de 15 ans d’emprisonnement. Il reviendra devant la cour dans la même affaire face à Baké Chabi Dafia, l’épouse de la victime qui s’est constituée partie civile.
Placé sous mandat d’arrêt le 21 janvier 2007 pour coups mortels, l’accusé Bouyagui Orou Kpayi, à la barre, a reconnu les faits mis à sa charge. Mais il a tenu à s’expliquer. Selon lui, la victime, Gado, a introduit, malgré son refus, les bœufs dans son champ de haricot. Après avoir renvoyé ces bêtes, Orou Yarou Gado est revenu le lendemain introduire, à nouveau, les mêmes animaux dans le champ. Et lorsqu’il renvoyait les bêtes de son champ, la victime, armée d’une houe et d’un bâton, s’est dirigée vers lui. Elle l’a pris par les pieds pour le mettre au sol en présence de son enfant de 17 ans environ. Sa réplique a été d’envoyer un coup de bâton à l’assaillant. Mais malheureusement, le bâton saisi était muni d’une pioche. Il a précisé que le coup envoyé a violemment atteint la tête de Orou Yarou Gado, son cohabitant à qui, il aurait d’ailleurs aidé pour la construction de son habitation. L’accusé a indiqué qu’il ne voulait pas donner la mort à Orou Yarou Gado et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est allé directement se confier au délégué du village lorsqu’il s’est écroulé. A sa suite, le ministère public a cherché à comprendre pourquoi l’accusé ne pouvait pas éviter la provocation de Orou Yarou Gado. Selon Bachirou Assouma Amadou, c’est la récurrence d’un phénomène aux conséquences dramatiques entre éleveurs et agriculteurs qui a conduit l’accusé devant la Cour. Selon lui, l’accusé doit être puni selon l’article 309 du code de procédure pénale, même s’il n’avait pas l’intention de donner la mort à la victime. Il a laissé entendre que les quatre éléments à rechercher pour coups mortels sont réunis dans cette affaire. Il s’agit de l’élément matériel que sont les coups mortels, la nécessité d’une victime humaine vivante qui est Orou Yarou Gado, l’élément moral qui est l’intention corporelle et le lien de causalité entre le coup porté et le décès de la victime. Finissant son réquisitoire, il a prévenu la cour à ne pas prendre en compte la défense de l’accusé qui risque d’orienter l’affaire sous le coup de la légitime défense. « Ce n’est pas le cas puisqu’il n’y a pas proportionnalité entre l’arme utilisée par l’accusé et les mains de la victime », a-t-il dit avant d’ajouter que l’enquête de moralité et le casier judiciaire de l’accusé lui sont favorables et qu’il possédait tous ses sens au moment de la commission du crime. Il a conclu que l’accusé est accessible à la sanction pénale qui veut qu’il soit retenu dans les liens de l’accusation de coups mortels et de le condamner à 10 ans de réclusion criminelle.
Les arguments de la défense
Dans sa plaidoirie, l’avocat, Emile A. Dossou Tanon, a demandé à la cour de tenir compte de la sociologie du milieu Bariba où l’honneur a un sens. Pour lui, l’accusé a été terrassé par quelqu’un qui le dominait sur le plan physique et en présence de son enfant. C’est dans sa volonté de sauver son honneur, a-t-il dit, que l’accusé a utilisé le premier outil qui était à sa portée et que son intention n’était vraiment pas de tuer sa victime. Il fait remarquer que la victime et l’accusé ont vécu 7 ans durant sans problème et que la bagarre au cours de laquelle la victime a trouvé la mort, était orientée par une main invisible. Il a demande à la cour d’accorder à son client de larges circonstances atténuantes. La défense a aussi indiqué à la cour, présidée par Edouard Ignace Gangny, que le ministère public est allé trop loin dans ses déclarations. Il a suggéré qu’à défaut de requalifier le crime en délit d’homicide involontaire, il faut au subsidiaire condamner l’accusé au temps qu’il a déjà passé à la prison civile de Parakou. Mais en prononçant la sentence, la cour a condamné l’accusé Bouyagui Orou Kpayi à une peine de 15 ans d’emprisonnement. Ayant passé 10 ans à la prison civile, il lui reste 5 ans pour purger sa peine. L’épouse de la victime dame Baké Chabi Dafia s’étant constituée partie civile, la Cour a indiqué à l’accusé qu’il se présentera à la prochaine session de la cour d’assises pour cause de dommages et intérêts de la partie civile.
Hervé M. Yotto
Le résumé des faits
Orou Yarou Gado et Bouyagui Orou Kpayi sont des cultivateurs. Ils travaillaient dans des champs mitoyens à Somborogou dans la commune de Banikoara. Dans la matinée du 27 décembre 2006, les enfants de Orou Yorou Gado ont introduit les bœufs dans le champ de haricot du voisin Bouyagui Orou Kpayi. Ce dernier renvoyait les bœufs et cette manière a déplu à Orou Yorou Gado qui lui a fait le reproche. Une bagarre s’ensuivait au cours de laquelle Bouyagui Orou Kpayi assenait un coup de pioche à la tête de OrouYorou Gado. Il a été transporté à l’hôpital de zone de Banikoara où il a rendu l’âme après quelques jours d’hospitalisation. Appréhendé et inculpé de coups mortels, Bouyagui Orou Kpayi a reconnu les faits à l’enquête préliminaire puis devant le juge d’instruction. Par arrêt N°161/15 du 23 novembre 2017, Bouyagui Orou Kpayi a été renvoyé devant la cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou. Il a été mis sous mandat d’arrêt le 21 janvier 2007 pour coups mortels.