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Tension entre la HAAC et les médias au Bénin : les journalistes béninois à l’étranger en parlent
Publié le jeudi 26 janvier 2017  |  Autre presse
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© aCotonou.com par CODIAS
Numéro 58 de Café Médias Plus avec El Hadj Azizou ISSA ministre de l`Agriculture, de l`Élevage et de la Pêche Léon Anjorin KOBOUDÉ Directeur de Publication de L`Afrique Union.
Maison des Medias, Cotonou le 12 juin. Dans le cadre de l`initiative Café Média Plus organisé tous les vendredis par les professionnels des médias béninois.




Bientôt 2 mois que dure cette situation de brouille entre les médias béninois et la haute autorité de l’audiovisuel et de la communication. Une tension qui meuble de plus en plus les débats, au-delà des frontières du Bénin, au point d’éveiller la réaction de certains professionnels des médias étrangers.

Quand de façon isolée et sans préavis vous condamnez près de 200 employés (c’est une évaluation approximative du personnel des 7 médias suspendus par le Président de la HAAC) à un chômage précoce, il est évident de s’attendre à des réactions et même souvent à un sentiment de colère voilé dans le qualificatif de « réaction pacifique». Plus cette situation dure et plus certaines réactions se feront de plus en plus sévères.

En effet, cette tension entre les journalistes et la Haac, au-delà du Bénin, a franchi d’autres frontières et engendre des réactions d’autres compatriotes et acteurs du monde de la presse.

« Je pense que pour une mesure conservatoire le délai est trop long, car cela fait probablement plus de 50 jours que ces médias sont suspendus et c’est cela qui pose problème. »

Ainsi, les confrères togolais, la veille du premier mouvement de contestation lancé par le Président de l’Union des Professionnels des Médias du Bénin (UPMB), ont, dans un communiqué rendu public, apporté tout leur soutien aux journalistes béninois touchés par cette décision absurde et arbitraire d’Adam Boni Tessi. Radio France inter (Rfi) dans un journal « d’Afrique Midi » évoquera très rapidement le sujet et s’enquit de l’image de la presse béninoise dans le prochain classement de reporters sans frontières. La décision suscite également la réaction des compatriotes journalistes dans les médias étrangers. Hamed Paraïso, Journaliste présentateur à « Télé-Sud » en France, ancien Journaliste de la première télé privée au Bénin, estime que le sujet peut être abordé sous 3 angles. Il évoque dans un premier temps, au-delà du rôle de protecteur des médias, la fonction régalienne de la HAAC qui, sur un principe purement contractuel, est en mesure de suspendre : «La Haac est en droit de surprendre n’importe quel média si ce dernier contrevenait à ses engagements». Néanmoins, il s’interroge dans la suite de sa réaction sur la qualité des démarches ayant conduit à cette décision très controversée du Président de la HAAC. « Je pense que pour une mesure conservatoire le délai est trop long, car cela fait probablement plus de 50 jours que ces médias sont suspendus et c’est cela qui pose problème. On est souvent passionné par ce qui nous touche nous même avant de parler des autres. Donc, je dis oui, la Haac a, certes, le droit d’appliquer les sanctions, mais elle doit le faire dans le cadre du strict respect des procédures prévues par la loi. ». Enfin, il évoque une troisième préoccupation qui selon lui interpelle toute la presse au Bénin. C’est la question du financement des médias; « Cette affaire relève un aspect fondamental qui depuis la démonopolisation des ondes au lendemain de la conférence de 90 demeure non résolu à ce jour. C’est la question du financement de nos médias. Je ne parle pas du modèle économique, mais je parle de qui doit détenir les médias dans notre pays, les hommes politiques ont accaparé à plus de 90% de l’ensemble des médias. Moi-même j’ai fonctionné dans cet environnement durant quelques années et je pense qu’il va falloir se pencher un jour sur la question. Pourquoi, croyez-vous aujourd’hui que très souvent, dans certains médias au Bénin, quand des journalistes exposent une analyse critique sur un pouvoir en place, l’opinion associe aussitôt cette tâche à une coloration politique ? ».

Léon Koboude, Directeur de publication du magazine « Afrique Union » en France a, quant à lui, un avis plus sévère sur cette décision de la Haac. C’est à croire que s’il était un des promoteurs d’une des chaînes suspendues, Boni Tessi, malgré son titre de président de la Haac, aurait sûrement fini devant les tribunaux pour non-respect de procédures. « Si l’on considère que cette décision de la Haac n’est pas juste et ne respecte aucune loi de la République, on peut donc demander aux promoteurs de médias suspendus d’assigner la Haac en justice, c’est une possibilité parce qu’on a envie de savoir où se trouve la vérité dans cette affaire…(…). ». Il déplore également l’atmosphère qui prévaut actuellement au Bénin et qui ne projette pas une bonne image du pays ailleurs. « Quand on suspend un média, c’est un espace de liberté que l’on ferme, c’est un espace de pluralité de l’information que l’on supprime donc on ne peut pas applaudir à une pareille décision parce que cela contribue à la pluralité de l’information donc de la démocratie.». La chute de sa réaction va se consacrer à une préoccupation assez particulière mais qui s’impose tant de fois quand on aborde, la configuration de la Haac . C’est le problème de la nomenclature. Bien que le Bénin ait été l’un des premiers pays à se doter d’un organe de régulation des médias, il reste néanmoins le seul pays de la sous-région qui préfère un homme politique au lieu d’un journaliste à la tête de cet organe. « Je crois que cette situation démontre de l’importante ou la nécessité aujourd’hui de réfléchir sur la question de savoir s’il faut laisser la Haac dans sa nomenclature actuelle, c’est à dire qu’on a une Haac qui depuis plus de 20 ans qui devient un bourreau pour les médias alors qu’elle devrait les protéger. Est-ce que depuis sa création, elle a répondu de façon irréprochable à cette mission ? ».

Hermann Boko, contributeur du « Le Monde Afrique » ne cache pas lui non plus sa grande déception face à cette mesure de suspension. Il le fit savoir dans un entretien «La liberté de presse est l’un des grands principes de la démocratie. Partant de là, on ne peut pas le remettre en cause en fermant moins d’une dizaine d’organes sous prétexte que des conventions n’ont pas été respectées. En l’occurrence la Haac n’a pas respecté ses propres procédures édictées par la loi organique: La mise en demeure.». Il ira plus loin dans la suite de sa réaction au point de faire passer le président de la Haac pour un ignare sur certaines dispositions de la loi organique «au-delà des réglementations et peu importe les circonstances, la liberté de presse doit être prioritairement préservée. C’est un fondement. Dans Les conventions internationales dont notre pays est signataire, il y a le droit du public à une information libre et crédible y compris même je pense dans le choix de ses canaux. La fermeture d’un organe est une entrave à ce droit.» . Pour finir, il adressera une sorte de mémo à l’endroit du gouvernement béninois. «Je pense aussi que le gouvernement doit prendre ses responsabilités et réagir ou du moins arbitrer. Parce que déjà qu’il ne communique pas assez, il a tout de même été plébiscité en mars 2016 avec le concours non mesurable de la presse.».
Les faits

Adam Boni Tessi, (ABT comme on le surnomme dans les coulisses) actuel président de la HAAC à courant fin novembre 2016, de façon isolée et inattendue pris une décision qui va provoquer la panique dans l’environnement des médias béninois. Il s’agit de la suspension de 7 médias sur le territoire national à savoir, 6 chaînes de télévision privées et une radio privée. Raison évoquée: « mesure conservatoire pour manquement aux engagements du cahier des charges. »

Mais du côté de certains médias suspendus, on évoque » Une délocalisation des installations et des lieux de production audiovisuelle« . Et face à cette raison, un responsable de médias a laissé entendre dans un entretien accordé à la rédaction de votre organe :« Si ce n’est que cela la raison, encore que chez nous, nous ne nous reconnaissons pas dans ce registre, je connais plusieurs autres médias qui fonctionnent actuellement dans de pareilles conditions sans que Boni Tessi ne leur fasse aucun reproche » .
La crise qui perdure

Dans le contexte actuel, cette tension occasionne de jour en jour, un vrai combat classique de David (les médias) contre Goliath (le président de la Haac) de plus en plus isolé et insensible aux différentes médiations pour une sortie de crise. C’est désormais une guerre syntaxique ouverte entre des journalistes et un homme lâché même par ses collaborateurs.

«Il est seul à prendre sa décision sans même prendre la peine de nous informer avant de le faire, sans mettre sur pied une commission comme le recommande notre loi organique. Alors qu’il gère seul, sa crise» rapporte un Conseiller de l’institution.

Au niveau de l’opinion en général, les avis sont partagés, certes, mais le grand renfort est dans le camp des journalistes, surtout quand on sait que deux médias appartenant à l’homme d’affaires Sébastien Ajavon figurent sur la liste des médias suspendus….

Mais malgré les mouvements de protestations et même malgré la médiation de la communauté islamique du Bénin, pour trouver une sortie pacifique de crise, ABT pour le moment n’attend pas lâcher prise.

Par: Fawaz Khalil (Contributeur Beninto Info)
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