Les organisations syndicales du secteur éducatif à la base qui ont déclenché depuis la semaine dernière un mouvement de grève, ne s’entendent toujours pas avec l’autorité de tutelle. Une rencontre de négociations qui a eu lieu ce jeudi 26 janvier entre les deux parties dans les locaux du ministère des Enseignements maternel et primaire (Memp) à Porto-Novo, s’est soldée par un échec comme les deux précédentes.
L’ambiance était très chaude ce jeudi 26 janvier au ministère des Enseignements maternel et primaire à Porto-Novo. Et pour cause ! Peu avant l’arrivée des responsables des organisations syndicales ayant déclenché le mouvement de débrayage dans l’enseignement maternel et primaire pour s’insurger surtout contre le rappel dans le système éducatif des inspecteurs et conseillers pédagogiques à la retraite, les militants à la base avaient déjà pris d’assaut les lieux très tôt le matin. Ils s’étaient massivement mobilisés pour un sit-in. Certains avaient en main des branchages et des castagnettes, et d’autres ont ceint leurs fronts de banderoles rouges pour manifester leur colère. Mais ils seront bloqués au portail du ministère fermé et gardé par une horde de policiers armés de matraque. Toute sortie et toute entrée étaient filtrées. Mais malgré le dispositif, les instituteurs et institutrices n’ont pas été ébranlés. Bien au contraire ils dansaient et chantaient des chansons hostiles au ministre Salimane Karimou. Ceux qui tentaient de franchir la ‘’ligne rouge’’ tracée par les forces de sécurité étaient automatiquement rappelés à l’ordre par les policiers. C’est dans cette atmosphère surchauffée que les responsables syndicaux invités pour une rencontre de négociations avec le ministre sont arrivés aux environs de 10 heures. Maxime Agossou-Vè et sa suite ont été accueillis par un tonnerre d’applaudissements des manifestants toujours blottis au portail. Les responsables syndicaux ont pu se frayer difficilement un chemin pour se rendre au cabinet du ministre. La réunion de négociations a commencé sous la houlette du ministre Salimane Karimou en personne. Mais à huis clos et loin des médias. Une première suspension est intervenue à 10 h 20. Une délégation des syndicalistes sort de la salle et se dirige vers les manifestants au portail. Silence radio tout le monde était impatient de savoir ce qu’il y a. Le porte-parole des organisations syndicales en grève, Maxime Agossou-Vè, prend le microphone et informe l’assistance de ce que la délégation syndicale a conditionné la reprise des négociations à l’ouverture du portail et à leur entrée dans l’enceinte du ministère, étant donné que c’est un sit-in pacifique annoncé et qui est accordé. Les responsables syndicaux ont été abondamment applaudis pour avoir soulevé cette question préjudicielle qui a obligé le ministre Salimane Karimou à lâcher du lest. Les policiers se sont exécutés en ouvrant le portail pour laisser enter les manifestants. C’était donc une petite victoire pour les enseignants qui, malgré le soleil de plomb, animaient dans la cour du ministère.
Les discussions proprement dites
La délégation syndicale est ensuite repartie dans la salle de négociations qui pouvaient donc se poursuivre. A 12 h 27, les discussions syndicales sont terminées. Les responsables syndicaux se sont approchés de leurs mandants pour le compte-rendu. Maxime Agossou-Vè reprend le microphone et informe les manifestants de ce que la délégation a débattu de trois points de revendication avec le ministre qui était assisté de certains membres de son cabinet. Le premier concerne la revendication phare relative au rappel des inspecteurs et conseillers pédagogiques retraités et le deuxième a trait à la question de la prise des décrets d’applications portant statut particulier des enseignants de la maternelle et du primaire. A ces deux points de désaccord lors des négociations du vendredi 20 janvier dernier, s’ajoute la revendication concernant le rétablissement des directeurs d’école déchargés pour avoir obtenu 00% lors de l’examen du Certificat d’études primaires (Cep) de 2016.
Par rapport au premier point, à en croire le porte-parole des organisations syndicales en grève, il n’y a pas eu d’accord. Le ministre a proposé, informe-t-il, aux enseignants de laisser les inspecteurs et conseillers pédagogiques retraités faire leur mission jusqu’aux congés de détente qui démarrent le 23 février prochain. Une évaluation sera ensuite faite pour voir s’il faut poursuivre l’expérience ou non. Cette proposition du ministre est une légère avancée par rapport aux trois mois qu’il avait proposés et rejetés par les syndicalistes lors des dernières négociations. Mais la partie syndicale a à nouveau balayé du revers de la main cette nouvelle proposition. Les enseignants grévistes se montrent fermes et exigent que le ministre rapporte ses arrêtés et notes de service pris à cet effet. Ils ne veulent pas des retraités comme encadreurs pédagogiques. Donc pas d’entente sur ce point tout comme la revendication concernant la prise d’actes relatifs aux décrets d’applications du statut particulier des enseignants. Le ministre a estimé à ce propos qu’il ne saurait prendre lesdits actes demandés d’autant que le décret en question est querellé. Salimane Karimou rassure les syndicalistes que les actes subséquents seront pris dès la relecture du décret querellé. Une proposition à laquelle s’opposent les organisations syndicales pour lesquelles, le décret en question pris sous le président Boni Yayi ne souffre d’aucune anomalie. Pas question alors de le relire.
Contrairement aux deux premières séances de négociation au cours desquelles il n’y a pas eu d’entente, les deux parties ont accordé leurs violons sur la revendication relative aux cas des directeurs d’école déchargés. Les syndicalistes ont approuvé la proposition du ministre invitant les enseignants concernés à retourner dans leurs nouvelles classes. Ceux qui seront performants pourront être nommés à la rentrée prochaine et non plus dans trois ans comme contenu dans le nouvel arrêté portant nomination des directeurs d’écoles maternelles et primaires. Le porte-parole Maxime Agossou-Vè invite donc la base à apprécier ce compte-rendu. Ce que celle-ci a rejeté en bloc en faisant constater que « le dilatoire » du ministre Salimane Karimou se poursuit. La base menace de reconduire encore la grève de soixante-douze heures la semaine prochaine, si l’autorité ministérielle ne revoit pas sa copie avant mardi 31 janvier prochain.
Thibaud C. NAGNONHOU, A/R Ouémé-Plateau