Mise en accusation pour crime de coups mortels, Sounon Wessi Maré était devant la cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou, ce mercredi 1er février. C’était pour être jugée conformément à la loi. Placée sous mandat de dépôt le 2 décembre 1992, puis ayant bénéficié d’une liberté provisoire, quatorze mois plus tard, soit depuis le 24 février 1994, elle a été condamnée à la peine de cinq ans de réclusion criminelle.
Une mésentente entre coépouses qui tourne au drame. Tel est l’affaire au centre du treizième dossier inscrit au rôle de la première cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou, au titre de 2017 et examiné hier. Les faits se sont produits dans la commune de Tchaourou.
Le mercredi 18 novembre 1992, en effet, Sounon Wessi Maré et Kannon Ahidjo Sanni, toutes les deux épouses de Sounon Gouongui, se rendaient au marigot, quand une dispute éclata entre elles, comme à leur habitude. Très vite, la situation a dégénéré en bagarre. Sounon Wessi Maré a réussi à terrasser Kannon Ahidjo Sanni, lui enserra la gorge comme pour l’étrangler, avant de la lui mordre à pleines dents, jusqu’à ce que mort s’en suive. Leur époux, alerté et ayant accouru sur les lieux, n’est venu que constater les dégâts.
Comme elle l’avait déjà fait, tant à l’enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur, Sounon Wessi Maré a également reconnu les faits à la barre, ce mercredi 1er février. Invitée par le président Célestin Jean-Mathieu Zanouvi et le représentant du ministère public, Bachirou Assouma Amadou, pour expliquer les circonstances dans lesquelles ils se sont produits, l’accusée a nié avoir mordu la gorge de sa coépouse avec les dents, mais s’être plutôt servie de ses mains.
Pour une sauce renversée
A la question du président de savoir comment est-ce qu’elles sont arrivées à se haïr à ce point, Sounon Wessi Maré indiquera que tout a commencé avec la sauce de sa coépouse qu’elle a renversée en piétinant un bois, alors qu’elles étaient en train de faire de l’igname pilée. Selon sa version, c’est au moment où elle se rendait au marigot que sa victime l’a attaquée avec un bois en main. Ayant pris le soin de déposer l’enfant qu’elle portait au dos, elle l’a saisie par le cou, avant de la jeter à terre. « Je lui ai serré le cou », a-t-elle avoué.
Si son bulletin n°1 reste vierge, l’enquête de moralité la présente comme une femme hargneuse qui cherche beaucoup la bagarre. Même son époux lui a reconnu ce caractère belliqueux et violent.
Pour le représentant du ministère public, Bachirou Assouma Amadou, se référant au rapport du médecin qui a relevé des empreintes de dents au cou de dame Kannon Ahidjo Sanni, il n’y a pas de doute. Sounon Wessi Maré a mordu sa victime au cou. Ce qui a occasionné son décès. Selon l’avocat général, le choix de la partie mordue indique bien que l’intention de nuire existait. Ainsi, les quatre éléments constitutifs de l’infraction de coups mortels, crime prévu et puni par l’article 309 alinéa 4 du Code pénal, sont donc réunis. La trouvant accessible à la peine pénale, au regard du rapport médico-psychiatrique, il demande à la cour de la condamner à cinq ans de travaux forcés. Ce que n’a pas accepté le conseil de l’accusée. Pour Me Maximin C. Pognon, il n’y a pas eu crime de coups mortels. A l’appui, il a déploré l’absence d’éléments, suite à un certificat médical, pouvant renseigner sur les causes réelles du décès de dame Kannon Ahidjo Sanni. Il a ensuite fait remarquer l’absence d’un certificat de décès dans le dossier. «Il est donc impossible d’établir un lien de causalité entre les traces constatées sur le cou de la victime et son décès», soulignera Me Maximin C. Pognon. Il demande alors une requalification du crime de coups mortels en coups et blessures volontaires avec cette circonstance que Kannon Ahidjo Sanni a perdu la vie après la bagarre. Son client, poursuit-il, n’aurait pas réagi, si elle n’avait pas été attaquée. Il plaide alors la légitime défense et demande son acquittement pur et simple.
La cour, après en avoir délibéré, déclare Sounon Wessi Maré coupable d’avoir volontairement porté des coups et fait des blessures sur la personne de Kannon Ahidjo Sanni, avec cette circonstance que les coups portés et les blessures faites sans intention de donner la mort, l’ont pourtant occasionnée. Elle la condamne à la peine de cinq ans de réclusion criminelle et fixe la durée de la contrainte par corps au maximum.
Mise en détention le 2 décembre 1992 et libérée provisoirement le 24 février 1994, Sounon Wessi Maré retourne donc en prison pour y passer trois ans et dix mois. Soit après avoir été libre pendant plus de 22 ans.
La cour qui a examiné ce dossier avait comme président Célestin Jean-Mathieu Zanouvi. Richard Akodossi et Névaly Y. Settin étaient ses assesseurs. Bachirou Assouma Amadou occupait le fauteuil du ministère public. Me Ambroise Alassane a assuré la mémoire de l’audience. Les jurés qui ont siégé sont : Soulémane Dramane, Tidjani El Hadj Issa, Emile N’Dah N’Yaba et Oumar Baparapé. L’accusée a été défendue par Me Maximin C. Pognon.
Maurille GNASSOUNOU A/R Borgou-Alibori