Que reste-t-il des libertés chèrement acquises 27 ans après l’historique conférence des forces vives de la nation ? Le Bénin célèbre cette semaine le 27ème anniversaire des assises de l’hôtel Plm Alédjo qui ont ouvert la voie au Renouveau démocratique après 17 années de marxisme-léninisme. Mais le tableau est loin d’être reluisant. La restriction des libertés, principal détonateur des mouvements populaires qui ont conduit à la conférence nationale, est plus que d’actualité. Et en la matière, le régime du ‘’Bénin Révélé’’ bat des records.
En 27 ans de pratique démocratique, le gouvernement du Bénin Révélé a, seulement en 10 mois, battu des records en matière de bâillonnement des libertés. La série d’atteintes aux droits d’association et individuels des citoyens, reconnus par la constitution, a commencé un 26 juillet 2016 lorsque les forces de l’ordre, lourdement armées, ont réprimé une marche pacifique des étudiants. Cette violation des droits élémentaires sera suivie d’une autre plus grande, l’interdiction le 05 octobre 2016 par le nouveau régime des activités des organisations faitières estudiantines dans l’ensemble des universités publiques. Dans la foulée, 21 étudiants ont été exclus, privés ainsi de leur droit à l’éducation. L’Etat central donnant ainsi l’exemple de ce qu’il n’est point préoccupé par la sauvegarde des acquis démocratiques, ses ramifications lui ont emboité le pas. Modeste Toboula, le tout puissant préfet du Littoral, prend un décret interdisant toute manifestation publique durant tout le mois de janvier violant ainsi allègrement les dispositions de l’article 25 de la Constitution du 11 décembre 1990. Dans le même temps, les gens d’une certaine confession religieuse ont exécuté leur marche annuelle dénommée « marcher pour Jésus » qui se tient au lendemain de la célébration de la fête des religions endogènes chaque 10 janvier pour, disent-ils purifier la ville. La Haac, l’autre institution qui dépend du pouvoir exécutif, s’est aussi illustrée sur le terrain de la privation des libertés en prenant la décision unilatérale de mettre sous scellés sept organes de presse. Deux fois de suite, cet organe de régulation des médias, censé assurer la liberté et la protection de la presse, a refusé l’accès à ses locaux aux professionnels des médias pour y exprimer, par un sit-in, leur mécontentement. Quand on a atteint une certaine limite, il n’y a plus de barrière. La dernière en date de cette montée vertigineuse du musellement des libertés, concerne l’irruption des forces de l’ordre dans un hôtel privé où les organisations estudiantines devraient tenir une conférence de presse. Tout ceci se passe au Bénin, laboratoire de la démocratie en Afrique et du vivant des personnalités qui, en 1990, ont mené aux côtés du peuple la lutte pour s’affranchir du joug du régime marxiste-léniniste.
Et pourtant, ils sont encore là…
Nicéphore Soglo, 1er ministre de la transition et 1er président de l’ère du renouveau démocratique, Albert Tévoédjrè, rapporteur à la conférence nationale, Robert Dossou, l’un des membres du comité d’organisation de la conférence nationale assistent en silence à cette violation exponentielle des libertés chèrement acquises. Dans un contexte sociopolitique où il n’existe presque pas d’opposition, et où la société civile est réduite à sa plus simple expression avec des acteurs qui nommés, d’autres contraints à la retraite, il devrait exister une troisième voie, celle des sages de la République, témoins de l’histoire qui, hormis toute considération politique, devraient être en mesure de taper du poing sur la table quand ça ne va pas. Vu le rôle de plus en plus inquiétant de l’argent dans le processus démocratique, il devrait exister une autorité morale, constitutionnelle ou non, à même de ramener les dirigeants dans le droit chemin lorsqu’ils s’écartent des fondamentaux de la conférence des forces vives de la nation. Ces personnages importants de l’histoire politique du Bénin doivent sortir de leur mutisme. Qu’ont-ils à perdre après tout ? Leur voix ajoutée à celle des Organisations de défense des droits de l’homme à l’image d’Amnesty international qui, dans son rapport 2016-2017 n’a pas été tendre à l’égard du gouvernement du Nouveau départ devraient être plus audible pour condamner la violation des libertés sous le régime Talon. La démocratie ne s’emporterait que mieux.
B.H