Les dernières nominations signées par le maire de Cotonou, Léhady Soglo, pour renforcer son équipe, n’échappent pas à la vigilance des observateurs de la vie politique du pays qui y voient la manifestation du respect des accords politiques d’une part, et sa détermination à en finir avec les procès perdus devant les tribunaux, d’autre part.
Contrairement aux années antérieures, les nouveaux cadres promus par le maire de la ville de Cotonou ne sont pas issus de la Renaissance du Bénin, parti dont il est le président. Cette fois-ci, les nouveaux collaborateurs de l’autorité municipale sont venus du « dehors ». Non seulement, ils n’étaient pas de l’appareil de la mairie, mais aussi, ils ne sont pas membres de la Renaissance du Bénin. Une vraie première chez les Soglo. Qu’est-ce qui explique cette nouvelle gouvernance à la tête de la municipalité de Cotonou ? On peut l’expliquer par plusieurs hypothèses, mais les plus plausibles évoquent les accords politiques entre le maire et ses alliés. Dans ces nominations, on relève que le locataire de l’hôtel de la ville de Cotonou veut rester ami et loyal avec ceux qui l’ont soutenu pour la conquête du pouvoir et qui, en retour attendent des postes au profit de leurs proches. C’est la suite logique de ce qui s’est passé lors de l’élection du maire et de ses adjoints. Alors, en l’absence d’une majorité confortable, LéhadySoglo qui n’avait pas son destin en main, a pu s’offrir le fauteuil de l’hôtel de ville, grâce au soutien des Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) et du parti Résoatao du député Mohamed HinnouhoAtao. En contrepartie, le maire élu a accepté d’ouvrir l’Exécutif aux conseillers issus des partis alliés. C’était la grande première. En dehors du maire LéhadySoglo qui est de la Renaissance du Bénin de même que le 2ème adjoint, Augustin Houessinon, les Fcbe sont bien présents dans l’équipe dirigeante et à la tête des arrondissements. Il s’agit du premier adjoint, Isidore Gnonlonfoun, ancien ministre de Yayi Boni et du troisième adjoint, Isaac Aïvodji. Les 8ème et 13ème arrondissements sont également aux mains des membres des Fcbe. Le parti Résoatao n’est pas du reste. En reconnaissance à son soutien, il a été associé au partage des postes. Le 3ème arrondissement de Cotonou est dirigé par l’élu du parti Résoatao. Ce partage des postes sur la base des accords conclus pour favoriser l’élection de LéhadySoglo a considérablement réduit la concentration des pouvoirs entre les mains des cadres de la Renaissance du Bénin. Ce qui n’était jamais arrivé à la mairie de Cotonou, où dans un passé récent, les postes étaient offerts aux militants dociles et obéissants de la Rb.
Léhady n’a pas le choix
Aujourd’hui, le parti n’est plus ce qu’il était hier. Cette nouvelle situation a obligé son président à signer des accords pour garder les commandes de la ville. En plus de ces postes occupés par ses alliés, l’Administration municipale vient d’être réaménagée avec l’entée en fonction des cadres qui n’étaient pas proches de LéhadySoglo. Environ une dizaine de nominations signées par le maire au profit des personnalités jugées proches de ses alliés politiques. Par exemple, la Direction des affaires juridiques et du foncier est sous les ordres de Francis Aimé Hodé, magistrat à la retraite, la Direction des services techniques est confiée à Lambert Ayitchéhou, la Direction des Services à la population est aux ordres de Richard P. HouénagnonAhlonsou, l’Inspection générale des services municipaux est contrôlée par Désiré Dieudonné Didavi, sans oublier les chargés de mission dont le nombre a augmenté, qui ne sont pas tous proches du maire. Tout cela justifie le fait que ce dernier ait été contraint au partage des postes. LéhadySoglo n’avait pas le choix s’il veut pouvoir compter sur les Fcbe pour sauver sa peau face aux nombreuses menaces de destitution qui planent sur lui. En effet, attendues depuis des mois, ces nominations ont été retardées pour diverses raisons. La plus officielle, c’est de trouver des profils adaptés au nouvel organigramme sur lequel reposera désormais l’administration pour plus d’efficacité. Les autorités ont alors demandé au personnel de la mairie de postuler aux différents postes en fonction de leurs profils. Beaucoup se sont dépêchés de déposer leurs dossiers conformément aux indications des autorités. Mais en réalité, les personnes qui ont été cooptées par le maire ne font pas partie des candidats qui ont cru en leurs chances en postulant aux postes qui correspondent à leurs profils. En clair, les autorités ont fait diversion en demandant publiquement lors du cérémonial des couleurs aux agents de la mairie de déposer leurs dossiers, alors qu’elles savaient qu’elles n’en tiendront pas compte. La surprise était générale quand le maire a rendu publiques ses nominations. Non seulement il a laissé sur la berge de nombreux collaborateurs qui étaient considérés comme ses hommes clefs, mais aussi il a confié de nouvelles responsabilités à des inconnus de la maison, mais qui, tous autant qu’ils sont, ont les capacités pour porter la charge.
Régler la question des procès
En plus de ce que ces nominations illustrent le partage du pouvoir, elles tendent à répondre à une question de grande importance pour la municipalité. Il s’agit des procès à n’en point finir que la mairie de Cotonou perd souvent devant les tribunaux. En signant ces nominations, LéhadySoglo a fait appel à des hommes de droit, sans doute pour l’encadrer dans la prise des décisions. C’est à juste titre qu’il a accepté de nommer Francis Aimé Hodé, magistrat à la retraite à tête de la Direction des affaires juridiques et du foncier. C’est le même but poursuivi à travers la nomination du Magistrat à la retraite, Gilles Modeste Sodonon, au poste de Conseiller techniques aux affaires juridiques. Le maire de Cotonou affiche ainsi sa détermination à faire bouger les choses à la mairie, mais aussi à se prémunir contre les tempêtes politiques qui pourraient lui coûter cher.
FN