Le Gouvernement est déterminé à réviser la Constitution du 11 décembre 1990, en catimini, dans la totale opacité. Alors que l’Assemblée Nationale n’a pas été encore officiellement saisie sur la question, le ministre de la justice annonce le toilettage de la loi fondamentale pour mars 2017. Au lieu de publier le projet de révision pour susciter un débat national sain, le Gouvernement préfère envoyer des éléments de langage dans certaine presse et sur les réseaux sociaux pour tester la réaction de nos concitoyens. On ne saurait toucher à une seule virgule de notre Constitution dans un tel environnement. Ça devient totalement incompréhensible, parce qu’au fond le régime et ses laudateurs ont tellement intoxiqué et manipulé, qu’aujourd’hui on voit bien qu’il n’y a pas de sens, pas de fond. Ils mélangent les pédales : «la révision vise à lutter contre la pauvreté, à donner de l’emploi aux jeunes, à constitutionaliser la chefferie traditionnelle, à assurer un mandat unique…» Bientôt ils nous diront que les réformes annoncées permettront de guérir le Sida et la maladie à virus Ebola. Pour éviter que cette révision se fasse sous la pression de l’occupant de la Marina, je pense que tous les Béninois épris de paix et de liberté doivent rejeter la procédure de révision en cours. Parce qu’elle porte atteinte à l’unité nationale et à la paix sociale. La Constitution étant la norme suprême de notre État, sa révision ne doit pas se faire dans la division, l’exclusion, la restriction des libertés publiques, les intimidations, les arrestations arbitraires, les règlements de comptes politiques, le chantage politique… La révision de la Constitution ne doit pas être la chose de la majorité du « Nouveau Départ» ou du «Bénin Révélé». Il faut un large consensus au sein des forces vives de la nation pour qu’elle puisse être astiquée. Osons le dire : La situation d’extrême pauvreté, de misère, de baisse des recettes de l’Etat, de fuite des investisseurs sérieux, de méfiance des marchés financiers de la sous-région et des institutions financières internationales et de traque des opposants et des opérateurs économiques nationaux que connait notre pays ne rend pas possible la révision de la Constitution. La Constitution ne doit pas être révisée lorsque le pays est divisé et les Béninois ont faim. Rien ne presse. Les préoccupations des Béninois sont ailleurs. Et les diversions du Gouvernement ne les dévieront pas de leur trajectoire. De toutes les façons, la ligne rouge à ne pas franchir est claire. Il s’agit des options fondamentales de la Conférence Nationale de février 1990, à savoir : la forme républicaine et la laïcité de l’Etat ; l’atteinte à l’intégrité du territoire national; le mandat présidentiel de cinq ans, renouvelable une seule fois; la limite d’âge de 40 ans au moins et 70 ans au plus pour tout candidat à l’élection présidentielle et le type présidentiel du régime politique au Bénin. Toucher donc les fondamentaux de notre République dans les conditions actuelles est suicidaire et ne garantit pas la stabilité politique, l’unité nationale et la paix sociale chèrement acquise par notre peuple depuis 1990. Si Patrice Talon tient à toucher à une seule virgule de la Constitution, il doit impliquer le peuple souverain. Sa gouvernance chaotique n’inspire pas confiance. Un dialogue public (démocratie participative) s’impose pour éviter le mur. La situation du Bénin est à haut risque. Et à l’allure où vont désormais les choses, j’invite mes chers compatriotes à se prémunir contre toute révision despotique, aventureuse, précipitée et partisane. Je suis profondément attaché aux acquis de la conférence nationale. C’est pourquoi, je ne souhaite pas que la Constitution qui en n’a découlé soit tripatouillée. Les réformes envisagées apparaissent douteuses quant à leur sincérité et à leur capacité de consolider la démocratie et la paix sociale au Bénin. Léonce HOUNGBADJI, Président du Parti pour la Libération du Peuple (PLP)