Tous reconnaissent, à l’unanimité, l’urgence de réformer le système partisan pour une consolidation de la démocratie béninoise. Cependant, dans la méthode et sur certaines dispositions clés inscrites dans le Projet de révision transmis au Parlement, le Professeur Victor Topanou, enseignant-chercheur des sciences politiques, le politologue Francis Lalèyè et le Vice-président de Alternative Citoyenne Urbain, Directeur de l’Anpe, Amégbédji ne partagent pas les mêmes points de vue. Invités sur l’Emission « Réformes en débat », coproduite par les télévisions Canal3 et Ortb, chacun des acteurs énonce des arguments pour se faire comprendre.
Soutenant le projet de révision, Urbain Amégbédji, a souligné que la réforme du système partisan est plus qu’urgente au regard, dit-il, de « la fragmentation excessive et du repli identitaire » que la multiplicité des partis engendre. Contrairement à lui, le professeur Victor Topanou fait remarquer qu’il se pose un problème de diagnostic qui a abouti à ce que les solutions proposées ne comblent pas les attentes. « Il se pose plutôt un problème de fonctionnement des partis. Il faut s’assurer que le diagnostic est juste. A-t-on pris le soin d’examiner l’impact des 200 partis sur les populations ? Agissons plutôt sur la loi électorale », a-t-il fait savoir. Le politologue Francis Lalèyè, quant à lui soutient que la réforme du système partisan ne saurait être réalisée que par la révision de la Constitution mais par l’application des lois électorales. « Rien, qu’en mettant en œuvre la charte des partis politiques, bien que imparfaite, nous n’aurons qu’une cinquantaine », affirme Francis Lalèyè.
« Le projet de révision favorise les plus représentatifs »
En réponse à ces réserves, le 2e vice-président d’Alternative Citoyenne a expliqué que la fragmentation des partis politiques empêche la population d’avoir de la visibilité dans les choix à faire, et qu’il faille œuvrer à favoriser les plus représentatifs à travers un financement. « La proposition ne limite pas mais favorise les plus représentatifs », soutient-il. De son côté, Francis Lalèyè déplore que l’on veuille faire croire que le financement règle tous les problèmes. « Ce n’est qu’une solution parcellaire. Et avec les seuils proposés dans le projet de révision, on pourrait se retrouver dans une configuration Nord-Sud », a-t-il déclaré. Même avis de la part de l’ancien ministre de la Justice, Victor Topanou qui prévient de ce que les seuils indiqués peuvent constituer des pièges pour la démocratie. « Et si, lors des prochaines élections aucun parti ne réunit les conditions fixées ? Le système partisan n’est pas lié qu’aux législatives. Les réformes ne peuvent être appréciées dans leur performance que par l’exactitude du diagnostic », argumente l’enseignant de sciences politiques.
Rebondissant sur les incompréhensions suscitées par la question des seuils dans l’attribution des sièges et pour le financement des partis, le Directeur de l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi (Anpe) a rassuré ses vis-à-vis que le seuil est une option. Il reste, précise-t-il, aux parlementaires de faire le débat et d’amender. Présent également au cours de l’émission, l’ancien Président de la Cour Suprême Abraham Zinzindohoué a attiré l’attention des uns et des autres sur la nécessité de clarifier dans la charte des partis politiques le concept de « Alliance ou groupe de partis » qui constitue un virus introduit dans la charte des partis politiques.
Des mandats harmonisés pour plus de stabilité ?
Au cours de l’émission, la question des mandats a été aussi abordée. Pour Urbain Amégbédji, l’augmentation de la durée des mandats des maires, des députés et du chef de l’Etat vise une harmonisation des élections et permettra d’avoir des forces politiques stables. « L’alignement permet de résoudre certains problèmes. Nous pouvons faire des économies sur l’organisation des élections », soutient le Directeur de l’Anpe. Des arguments que ne partagent pas Victor Topanou et Francis Lalèyè pour qui cette solution ne pourra régler la question de la cherté des élections au Bénin.
Fulbert ADJIMEHOSSOU