Le président de la Haute cour de Justice du Niger est en séjour au Bénin. Il a été reçu, ce mercredi 12 avril, par son homologue béninois. A l’occasion, les deux personnalités ont échangé sur les bonnes pratiques et jeté les bases d’une coopération fructueuse. La séance de travail s’est tenue au siège de la Haute juridiction à Porto-Novo.
Il existe plusieurs points de similitude entre la Haute cour de Justice du Bénin et son homologue du Niger. Les deux juridictions se rejoignent en grande partie dans la procédure. Tout comme la Haute Cour de Justice du Bénin, celle du Niger juge le président de la République et les membres du Gouvernement pour des crimes et délits commis à l’occasion ou à l’exercice de leurs mandats. Les tribunaux de droit commun sont compétents pour juger leurs complices et leurs co-auteurs.
C’est en substance ce qu’on peut retenir de la séance de travail tenue, ce mercredi 12 avril à Porto-Novo, entre la délégation de la Haute Cour de Justice du Bénin et son homologue du Niger dont la forte délégation est conduite par le président de cette institution, Karidio Mahamadou.
La présidente de la Haute Cour de Justice du Bénin a loué l’initiative de cette visite de travail de ses pairs nigériens. Selon Marcelline Gbèha Afouda, la rencontre offre l’occasion pour les deux institutions de se connaître, de mutualiser leurs expériences et de partager les bonnes pratiques. Ce qui pourra permettre la mise en place d’un partenariat entre les deux institutions à qui sont assignées les mêmes missions : la lutte contre l’impunité des gouvernants.
A l’occasion, la présidente de la Haute Cour de Justice a levé un coin de voile sur la mission, les attributions, les compétences, la procédure et le fonctionnement de son institution composée de treize membres.
Depuis sa création en février 2001, souligne-t-elle, la Haute cour de justice n’a jusqu’ici obtenu le moindre grain à moudre. Elle n’a jugé encore personne après plus de seize ans d’existence. Cette situation est surtout due à la procédure devant la Haute juridiction, laquelle a prévu deux étapes : la décision de poursuite du chef de l’Etat ou des membres du Gouvernement et la mise en accusation après l’instruction du dossier par la chambre d’accusation de la Cour d’appel territorialement compétent.
Une procédure complexe
Les deux phases sont toutes votées à la majorité des deux tiers des députés composant l’Assemblée nationale. Ce n’est qu’après ces deux étapes que la Haute Cour de Justice est appelée à juger le mis en cause. Une double procédure que la présidente de la Haute Cour de Justice trouve complexe et pas de nature à permettre à son institution de jouer efficacement son rôle. La preuve, depuis 2015, cinq rapports de la chambre d’accusation de la Cour d’appel de Cotonou faisant office de chambre d’instruction près la Haute Cour de Justice contre cinq anciens ministres du Gouvernement, sont envoyés à l’Assemblée nationale pour que la mise en accusation soit prononcée contre les mis en cause. Mais jusqu’ici ces rapports n’ont pas bougé du côté de l’Assemblée nationale, a expliqué avec regrets à ses hôtes Marcelline Gbèha Afouda. Ce qui l’amène à conclure qu’à la saisine de la Haute Cour de Justice dépendra de l’humeur des députés.
Le président de la Cour suprême, Ousmane Batoko, membre de la Haute Cour de Justice, a expliqué que la procédure a été corsée ainsi pour éviter que la Haute Cour de Justice soit instrumentalisée pour régler des comptes. Qu’à cela ne tienne ! Marcelline Afouda plaide pour l’amendement de la procédure afin de rendre l’institution opérationnelle et plus efficace.
La délégation de la Haute Cour de Justice du Niger a expliqué aussi la situation de son institution composée de sept membres dont quatre députés parmi lesquels sont élus le président et le vice-président. Les trois autres membres sont des magistrats dont un désigné par la Cour de cassation, un par le Conseil d'État et le dernier par la Cour des comptes.
Créée en 2010 avec la nouvelle Constitution du 25 novembre 2010, la Haute Cour de Justice de Niger a déjà reçu des clients dont l’ancien Premier ministre du Niger, Hama Amidou. Deux autres cas sont actuellement en instance au Parlement pour être envoyés devant elle, a révélé le président Karidio Mahamadou.
Thibaud C. NAGNONHOU, A/R Ouémé-Plateau