Les Etablissements privés d’enseignement supérieur (Epes) redoutent la tenue effective des examens nationaux en Licence et Master. Un tour dans certaines universités privées de la place, et le constat laisse perplexe. L’Université catholique de l’Afrique de l’Ouest (Ucao) et l’Université Africaine de Technologie et de Management ont quelques filières en commun, mais avec des contenus différents. Dans la filière Agronomie à l’Ucao, les matières, Gestion des entreprises rurales et Agricoles (Gera), production animale (Pa), Production végétale (Pv), stockage-conservation et conditionnement des Produits agricoles (Sccpa) sont enseignées. Alors qu’à Uatm Gaza-Formation, il est enseigné les matières telles que Production animale (Pa), Production végétale (Pv), agroéconomie, et gestion des industries Agroalimentaires. Plus loin, en génie électrique et informatique, l’Ucao enseigne l’automatisme et système de production, l’électronique, l’électrotechnique, l’Informatique industrielle, la maintenance, la télécommunication et le réseau informatique. Par contre, à l’Uatm Gaza-Formation, l’intitulé de la filière a été modifié. Appelée Gestion informatique, on y enseigne des matières telles que la Charge d’études statistiques, les Réseaux informatiques et télécommunication, le système industriel, les systèmes informatiques et logiciels (Sil), les équipements embarqués et informatique en temps réel. « Chaque établissement enseigne le module de formation qui lui convient selon la capacité d’assimilation des étudiants. Nous ne sommes pas tenus d’avoir les mêmes programmes que les autres établissements. Chacun est responsable de sa formation », déclare Gérard Akindes, Secrétaire Général Pigier-Bénin. Même son du côté de cloche de Gervais, étudiant en année de licence à l’Uatm Gaza-Formation, qui fustige le fait que les matières à eux enseignées, ne sont pas en adéquation avec la filière choisie. « Je prépare ma licence en Gestion des ressources humaines. Mais depuis que j’ai commencé, les cours que je reçois n’ont rien à voir avec cette filière. Tantôt, c’est des cours en comptabilité, en gestion des finances publiques…. », dit-il.
Cette différence dans l’enseignement des modules de formation donne matière à réfléchir, car les établissements ne savent pas encore par comment le Gouvernement entend organiser les examens nationaux. « On se demande comment les examens vont se dérouler », s’interroge Gérard Akindes, Secrétaire Général Pigier-Bénin, qui trouve qu’avant de prendre la décision d’organiser des examens nationaux, il faut d’abord identifier des filières, les programmes par filière. En quelque sorte, selon lui, le gouvernement doit donner de façon officielle un programme. « Jusque-là, rien n’est fait », déclare-t-il. Une affirmation qui est aux antipodes des actions du Gouvernement dans ce cadre. « Les étudiants de ces établissements d’enseignement supérieur privés ont du mal à terminer leur formation en licence. Alors qu’ils avaient pour habitude depuis plus d’une décennie de soutenir leur mémoire pour finir leur cursus universitaire, cette année, ils seront confrontés à un examen national conformément au décret du gouvernement », argue-t-il.
Les étudiants sur un fil raide !
A cinq mois des examens nationaux en licence et master, les étudiants sont confrontés vivent pour l’heure à un dilemme relativement aux matières dans lesquelles ils seront évalués, étant donné qu’elles varient d’un établissement à un autre. Pour Sosthène, étudiant en master, « nous sommes en train de naviguer à vue. Tant que les programmes d’exécution ne seront pas clairement définis, nous risquons de nous retrouver avec de nouvelles matières aux examens nationaux ». Plus loin, Lionel, étudiant en Licence déclare : « Ce n’est pas maintenant qu’il faut parler d’harmonisation des programmes. La concurrence entre les universités fait que chacun veut y mettre du sien afin de produire de bons résultats. Cet état de choses nous pénalise parce que toutes les notions acquises de la première en troisième année risquent d’être balayées. Que pouvons-nous apprendre en moins de cinq mois ? ».
Les clarifications du gouvernement
Pour le Directeur des établissements privés d’enseignement supérieur, Prof Dodji Amouzouvi, la commission nationale d’homologation travaille d’arrache-pied pour harmoniser d’ici les jours à venir, les programmes de formation. En effet, selon lui, un établissement qui n’a pas un programme homologué ne peut pas présenter des étudiants. « Il y avait quelques nuances d’un programme à un autre. Sur la base de ces nuances, le ministère a ordonné le processus d’harmonisation des programmes. A ce jour, les programmes homologués en licence sont harmonisés. Ce problème n’existe plus, parce qu’avant, la nuance est minime. Mais aujourd’hui, cette nuance est levée », clarifie-t-il. L’autre aspect que relève le Depes, c’est que l’Etat ne peut pas homologuer deux programmes contradictoires pour une même formation. « Si la Commission nationale d’homologation reçoit deux programmes en Mrh de deux universités différentes, on ne peut pas sortir pour la même filière deux programmes différents. Le fait de dire qu’on a donné des programmes différents à des établissements privés est un peu exagéré… », explique-t-il. Selon lui, non seulement, il se pose un problème de dénomination des matières, mais il y a aussi que le système qui était mis en place jusque là était tel qu’au départ du processus, c’est les établissements qui apportaient les programmes et l’Etat les validait. « Aujourd’hui, les choses ont changé. C’est l’Etat qui met les programmes à la disposition des établissements privés…le contenu demeure le même d’un établissement à un autre », rassure-t-il.
Craindre la perte de la clientèle !
« Ce n’est pas une bonne nouvelle pour les parents d’étudiants qui seront obligés d’augmenter les frais pour les cours de renforcement », affirme Gérard Akindes qui ne trouve pas encore utile l’organisation des examens nationaux en Licence et Master. Pour lui, les parents d’étudiants auront plus à dépenser, en dehors des frais de scolarité et autres. Mais selon Théophane Ahyi, Directeur de Uatm Gaza-Formation, la décision est la bienvenue, puisque les examens nationaux permettront d’évaluer la performance des établissements. « On ne perd aucune ressource. C’est l’Etat qui organise. L’Etat va demander aux apprenants de donner comme au Bts 15 ou 20 mille Fcfa. A partir de là, on ne donne rien. En plus de ce que les étudiants ont remis, l’Etat peut faire le complément. Seulement, après les résultats, les parents pourront se rendre compte de ceux qui font véritablement le travail », affirme-t-il. Au regard de l’actualité dans les universités privées, il y a deux camps qui se dégagent. « Je fais partie d’un groupe de promoteurs d’établissements d’enseignement dénommé Grand forum. Ce groupe apprécie également la décision parce qu’elle leur permettra de jauger le niveau de leurs étudiants et de mettre les parents d’étudiants en confiance en même temps qu’elle rassure la crédibilité de leurs établissements », explique-t-il. A l’en croire, aucune école supérieure privée n’est homologuée au Bénin. Contrairement à Théophane Ahyi, certains responsables d’établissements privés n’approuvent pas totalement cette décision.