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Edito du 07 octobre 2013 : les prisonniers de l’ORTB
Publié le mardi 8 octobre 2013   |  L`événement Précis


Le
© Autre presse par DR
Le professeur Albert Tévoédjrè, médiateur de république


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Il y a des révoltes nécessaires et urgentes. Pour paraphraser Albert Tévoédjrè, il est d’une « immédiateté brûlante » de mettre fin à l’humiliation que constitue pour la démocratie béninoise l’absence totale de débats d’idées sur la chaine publique de télévision qu’est l’ORTB. C’est si criard qu’en une semaine seulement, les Allemands ont organisé, coup sur coup, deux débats publics dans notre pays, certainement pour remédier à cette situation qui risque d’étouffer les fragiles acquis démocratiques de ces deux dernières décennies.

D’abord sur Canal 3 avec la Fondation Conrad Adenauer et ce vendredi avec la Fondation Friedrich Ebert. C’est exactement comme dans les années 1990, au sortir des années de plomb, où les Européens avaient acheté des espaces à la télévision nationale pour y faire la promotion de la démocratie et du civisme à travers l’émission « Entre nous ». Sommes-nous retournés vingt ans en arrière ?

Il y a que la télévision nationale vit une tragique situation de recul de ses performances. Accusons toujours le Chef de l’Etat
Selon quelques-uns, c’est bien lui qui musèle journalistes et techniciens pour les empêcher d’exercer leur métier. Selon d’autres, il serait responsable de l’absence généralisée de professionnalisme qui sévit, telle une dangereuse peste, dans cette maison qui ne vit que de nos impôts. Il serait si intelligent et si fort, lui Yayi Boni, qu’il les empêcherait de puiser dans le tréfonds même de leur orgueil pour dire non à l’imposture érigée en valeur. Il serait carrément si écrasant que les confrères de là-bas s’empêcheraient de lever le plus petit doigt pour exiger que la chaine dispose d’un programme sérieux. D’un programme sérieux, vous entendez ? Que donc le programme de la plus grande chaine de télévision du Bénin ne soit pas réduit aux nombreux allers et venues du seul chef de l’Etat.

Résultat, aujourd’hui, les Béninois sont de plus en plus nombreux à ne plus suivre la chaine-mère. Et je me demande comment des confrères ayant fait les plus grandes écoles de journalisme ne se rendent pas compte que le public commence à les mépriser ouvertement, à les prendre pour des imbéciles qui vendent leur métier au diable pour gagner quelques cacahuètes. Au nom de quelle république et de quel président peut-on accepter que des professionnels qui auraient pu faire la fierté de tous soient aujourd’hui réduits à être de minables épouvantails d’un régime qui n’en a certainement pas besoin?

Au regard du pluralisme médiatique d’aujourd’hui et surtout de la sophistication de plus en plus avancée des moyens de diffusion, personne ne peut soutenir que l’exposition télévisuelle permanente du Chef de l’Etat rend service à son action. Boni Yayi n’est plus écouté par son peuple et toutes ses paroles sont sources de méfiance et de méprise parce que la télévision nationale a perdu en qualité. Qui n’a pas droit à la critique ne mérite aucune suspicion de compétence ou d’indépendance.

Se présentant constamment comme une chaine à la solde d’un individu, fût-il président de la république, la chaine discrédite précisément toutes les actions de celui-ci en le faisant prendre pour un monstre, un dictateur borné, à l’égo surdimensionné et vivant au moyen-âge.

Je persiste à croire que les professionnels de là-bas doivent rendre service au Chef de l’Etat qui échoue pratiquement dans toutes ses actions à cause de cette communication qui ne communique rien, mais détruit tout. Ils doivent ouvrir leurs yeux et s’indigner (enfin !) de la détérioration de leur image auprès des annonceurs, des partenaires et de leurs spectateurs.

Par contre, par rapport à la radio nationale, quel contraste ! Toujours dans le même cadre de l’ORTB, les confrères de là-bas, à commencer par leur ancien patron Christian de Souza, pourtant beau-frère du chef de l’Etat, font régulièrement des débats contradictoires. Ils ne font aucune compromission avec le professionnalisme. Et c’est pourquoi, il est évident que la pratique des confrères de la chaine mère, et en premier chef, de leurs responsables, constitue une plaie ouverte sur notre conscience nationale.

Attachés de presse des ministres et autres présidents d’institutions par-ci, chargés de communication par là, pour la plupart, ils ne sont pas en position d’être indépendants vis-à-vis du pouvoir. Sous cape, ils accusent Boni Yayi d’avoir déstabilisé la télévision nationale, en oubliant de préciser qu’aucune liberté de ne se donne. Qu’elle s’arrache à la force du poignet.


Par Olivier ALLOCHEME

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