Après la sécheresse accrue à laquelle a été confrontée ces dernières années l’Afrique subsaharienne, elle fait désormais face à une invasion de chenilles légionnaires. Au Bénin, face aux dégâts des insectes envahisseurs, une riposte chimique a été enclenchée pour anéantir ces insectes difficilement contrôlables.
Très rapides, se reproduisant en masse et dotées d’une grande capacité de nuisance, les chenilles légionnaires de maïs prennent, à nouveau, le contrôle des champs de cultures vivrières au Bénin. Après le Zou, les Collines, et le septentrion, où ils ont semé la terreur, il y a quelques mois, ces insectes en provenance de l’Amérique ont pris d’assaut la vallée de l’Ouémé. Les pertes sont évaluées à plusieurs dizaines de milliers d’hectares. « Ce sont des insectes qui font des dégâts énormes. Ils sont capables de pondre plus de 300 œufs par nuitée. Ils s’entretuent et ceux qui résistent se développent et attaquent les cultures. En l’espace de quelques heures, les chenilles peuvent détruire tout un champ », explique Dr Rachidatou Sikirou, Directrice du Centre de Recherche Agricole d’Agonkamey.
En 2016, environ 39540 hectares de cultures ont été dévastés par les chenilles, touchant 26400 ménages. 41.517 tonnes de cultures ont été donc perdues, ce qui représente 30% de la production escomptée sur ces emblavures. A l’Institut National de Recherche Agricole du Bénin (Inrab) comme à la Faculté des sciences agronomiques (Fsa) de l’Université d’Abomey-Calavi, entomologistes et phytopathologistes s’efforcent de comprendre l’insecte pour trouver les moyens de lutte. « Nous sommes à pied d’œuvre pour parer au plus pressé. Face aux dégâts, nous ne pouvons que saisir les actions curatives », nous confiait, il y a quelques mois, le Professeur Elisabeth Zannou, entomologiste.
Des insecticides pour faire face à l’invasion
Comment cette espèce exotique est-elle arrivée en Afrique ? Par les denrées alimentaires importées ou grâce aux vents en survolant l’Atlantique ? Les changements climatiques ont-ils favorisé ce fléau auquel les agriculteurs font face ? Possible, selon les chercheurs rencontrés. Mais en attendant de mieux cerner ces insectes et de développer des méthodes de lutte efficaces, la riposte reste essentiellement chimique. Plusieurs insecticides homologués par le Comité National d’Agrément et de Contrôle des Produits Phytopharmaceutiques ont été testés. « Cet insecte n’était pas connu. Nous avons conseillé les produits déjà homologués sur les cultures vivrières pour faire face à ce fléau. Il y a entre autres les produits à base d’Acetamipride dont le Pacha et un autre produit binaire. Les produits qui n’ont pas été homologués sont formellement interdits. », indique Dr Rachidatou Sikirou. Mais en ce qui concerne l’efficacité, l’appréciation est relative. En plus du fait que l’insecte développe une résistance aux produits chimiques, le respect des protocoles d’utilisation et la qualité du produit entrent en ligne de compte. « Pour le moment, presque tous les produits testés ont montré une efficacité. Il y a des producteurs qui se disent satisfaits mais d’autres non. Certains, en mettant une fois le produit pensent que c’est fini et abandonnent », précise la Directrice du Laboratoire de défense des cultures. Dans le même temps, des producteurs font recours à des produits non encore homologués par le Comité National d’Agrément et de Contrôle des Produits Phytopharmaceutiques pour parer au plus pressé. Plusieurs autres pays, notamment ceux de l’Afrique Australe sont aussi confrontés à ce fléau. L’Onu, le Pam et le Fao s’en préoccupent.
Fulbert ADJIMEHOSSOU