’acquisition par le Président Patrice Talon d’un domaine de l’Etat jouxtant son domicile privé continue de faire grincer des dents au sein de l’opinion publique. Face à la presse hier, jeudi 04 mai 2017, au siège du Parti Communiste du Bénin (Pcb), Pr Philippe Noudjènoumè, premier secrétaire du parti et Président de la Convention patriotique des forces de gauche a dénoncé une prise illégale d’intérêt et un hold-up de Patrice Talon sur le domaine de l’Etat.
Courant janvier 2017, le Chef de l’Etat a sollicité et obtenu de la Cour constitutionnelle, l’autorisation de racheter un domaine privé de l’Etat d’une dimension de 2930m2 (soit environ six parcelles de 500m2) à un prix jugé “généreux“ de 979 millions de FCFA. Un montant qui devra permettre, à en croire le Pr Philippe Noudjènoumè, au ministère des affaires étrangères d’acquérir un nouvel immeuble à un prix de 500 millions de FCFA. D’après sa réponse à l’instruction de la Cour, le Président Patrice Talon affirme vouloir destiner l’immeuble à l’aménagement sur fonds propres d’un espace dédié à la réception de ses hôtes officiels et privés. “Sur la base de quoi, dans sa décision Dcc 17-009 du 06 janvier 2017, la Cour constitutionnelle accorde l’autorisation. Cette décision de la Cour constitutionnelle comme beaucoup d’autres fait partie de la panoplie de celles à polémique et dont le caractère incongru, arbitraire et somme toute « illégal » est aisé à démontrer, se désole le conférencier. Décortiquant l’autorisation d’acquisition de l’immeuble sis au lot n°558-559 à la zone résidentielle Ehouzou Nima à Zongo, dans le 11è arrondissement de Cotonou, Pr Noudjènoumè relève de graves illégalités dans la décision de la Cour. « Les problèmes que soulèvent ces illégalités ont trait aux éléments de droit suivants : quelle est la loi applicable en l’espèce au regard de la personnalité du bénéficiaire de la vente, le Président de la République en l’occurrence ? La mauvaise application de la loi N°2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin ; le moment d’intervention de la mise en vente ; l’usage qui est fait de l’immeuble actuellement et l’affectation donnée, prévue à l’immeuble une fois vendu » clarifie-t-il. Pour lui, la constitution a été violée notamment son article 52 car jusqu’à ce jour, aucune loi ne détermine cette procédure de l’octroi de l’autorisation à donner par la haute juridiction.
La Cour complice ?
La Cour a donc recouru, selon ses dires, à la loi portant code foncier et domanial, une loi qui ne s’applique au Président de la République et aux membres du gouvernement en fonction. « C’est donc par abus de droit et par violation flagrante de notre Constitution que la Cour constitutionnelle s’est permis le droit d’autoriser, sur la base d’une loi n’ayant pas le même objet, la cession de l’immeuble de l’Etat au Président de la République », dénonce Pr Philippe Noudjenoumè. Et de poursuivre « L’opération d’acquisition du domaine privé de l’Etat par le Président Talon est un hold-up effectué en complicité avec la Cour Constitutionnelle pour les motifs de droit que sont la violation de l’article 52 de notre Constitution, illégalité manifeste consistant en la manipulation des lois et des conclusions qui en sont tirées ; la non réunion des conditions d’un contrat de vente ». Tout en dénonçant une prise illégale d’intérêt, il appelle Patrice Talon à retourner ledit immeuble dans le patrimoine de l’Etat. En tout état de cause, le peuple béninois n’acceptera jamais ce fait accompli. Il se donnera les moyens de reprendre ce domaine pour le retourner dans le giron de l’Etat. Quel que soit le temps que ça durera », conclut Philippe Noudjènoumè.
Aziz BADAROU