Visite de courtoisie sous le couvert du ramadan, des retrouvailles après des absences, bref, les amitiés se nouent et se consolident. On ne peut vraiment rien trouver de si gênant dans ces visites devenues routinières, mais au fond, tout ceci n’est pas banale.
La politique béninoise a la particularité de se construire sur l’irréel. L’homme politique a toujours cette facilité de briser l’inconfort relationnel et même idéologique quand cela l’arrange ou peut-être quand il se sent menacé. On l’a toujours dit, la politique par ici, c’est le jeu des intérêts. Lorsqu’un politique allié au départ se découvre à un moment donné, ‘’la mission républicaine’’ de revendiquer son autonomie, il y a quoiqu’on dise des raisons sans doute éthiques, mais aussi souvent démagogiques. Si le Bénin a le mérite, depuis un moment, d’être l’un des Etats africains à n’avoir jamais connu de guerre, c’est justement du fait de cette facilité de compromission de l’élite. On a toujours avec un élan d’orgueil ‘’soumis’’, exprimé ce confort selon lequel la paix au Bénin tient à cette facilité de l’élite béninois de se retrouver derrière caméra et d’échanger. « Ils se chamaillent devant caméra, mais se retrouvent la nuit pour échanger », est l’expression consacrée. Beaucoup le voient comme le baume, le calmant à cet embrasement social qui a été, à la vérité, évité depuis longtemps. Mais est-ce qu’il ne faudrait pas finalement évaluer ce que toutes ces formes de concession et de conciliabule ont pu coûter à ce peuple. Est-ce qu’il ne faudra pas craindre sur la durée une forme de désaveu et même de discrédit de cette élite par l’opinion ? Est-ce qu’ils ne sont pas finalement fatigués de ces discours si longs et souvent entourés de dithyrambes qui ne changent fondamentalement rien à leur quotidien? Est-ce qu’on n’arrivera pas à ce désintérêt total et à cette passivité feignant l’apathie d’un peuple qui se voit désabusé et à la limité dérouté ? Ces questions tout aussi d’intérêt expriment la crainte d’un comportement sociétal qui s’exprime peu ou prou dans une opinion plus que jamais pessimiste. Dans un contexte pareil, est-ce qu’il n’est pas vraiment souhaitable que le politique béninois revoie sa copie ? Est-ce qu’il ne serait pas plus objectif de sa part, de travailler résolument pour le bien-être de ce peuple que de penser qu’en un tour de bras et qu’en un tour de spectacle et de cash, il peut toujours avoir ce qu’il veut. Les élections législatives approchent et les grandes rencontres se font. Des hommes aux approches différentes se voient et échangent. Des gens au parcours divergent s’illustrent et s’organisent. On voit des ballets et des ballets. Les réunions se multiplient avec toujours au fond, des concessions et des compromissions. Le politique béninois a cette facilité de se pardonner les péchés réciproques. Le comportement est tellement sage que Jésus-Christ, dans l’au-delà, devra se réjouir. Il n’y a pas de faute ou de péché qui ne puisse être commué par le politique béninois surtout quand il sait que derrière cet absoute, il y a la rédemption financière. Et donc, ceux dont la vie n’a constitué qu’à faire de la politique et à vivre sur la base des privilèges du pouvoir s’organisent pour 2019 et 2021. Quand ils auront fini derrière leurs murs discrets le plan de paupérisation de ce peuple, ils s’inviteront une nouvelle fois en sauveur. Une fois encore, des hommes et femmes appelés à les porter seront sollicités pour l’effet de charme. Du cash, il en aura certainement pour le job. Mais tout ceci n’est que du vent. Rien ne changera.
Abdourhamane Touré