De nombreuses villes du Bénin, notamment Cotonou, sont arrosées depuis quelques jours par des pluies diluviennes dont la fréquence et l’intensité inquiètent les populations. C’est une tendance qui pourrait s’étendre sur les mois de juin, juillet et d’Août, avec des cumuls pluviométriques globalement excédentaires.
Les pluies qui s’abattent sur Cotonou et environs, ces derniers jours, ne démentent pas la prévision saisonnière des caractéristiques agro- climatiques de la zone sahélo-soudanaise. Entre le 02 et le 06 juin 2017, au moins 157 mm de précipitations ont été enregistrées. Une tendance qui justifie largement les craintes des populations, selon Pierre Dako, Chef service climatologie de Météo Bénin. « Le rythme est assez accéléré. A cette allure, si ça doit continuer, nous allons dépasser largement la moyenne pluviométrique établie sur une trentaine d’années pour le mois de juin, c’est-à-dire la normale. Ça déverse une grande quantité d’eau sur la terre et c’est donc normal que les rues soient jonchées d’eau et les populations se plaignent », explique-t-il.
Le phénomène est sous régional. Le Forum des Prévisions Saisonnières des caractéristiques agro-hydro-climatiques de la zone Soudano-sahélienne, tenu à accra du 15 au 19 mai dernier annonce une saison avec des cumuls pluviométriques globalement excédentaires, un démarrage précoce anormal et des niveaux d’eaux équivalents ou supérieurs à la moyenne dans la majeure partie des bassins fluviaux. Les zones couvrant le Nord Ghana, le Nord Togo, la moitié Est du Burkina Faso, l’Ouest Nigéria, l’Ouest Niger, le Centre Mali, le Sud Mauritanie, la Gambie, le Nord Sénégal, le Sud Tchad et l’Est Cameroun et bien évidement le Nord du Bénin sont surtout concernés.
Le septentrion dans le viseur
L’Agence nationale de la météorologie, Météo-Bénin prévient pour la saison des pluies Juin-Juillet-Août tout le Bénin connaîtra des excédents pluviométriques du Sud au Nord. Cependant, en ce qui concerne la saison Juillet-Août-Septembre, seule la partie Nord de notre pays connaitra des excédents pluviométriques. « Du sud jusqu’à la hauteur de Parakou, le Bénin se trouve dans une tendance quasi normale par rapport à la moyenne climatologique observée ces 30 dernières années. Mais au-delà, la tendance restera excédentaire », déclare Pierre Dako.
C’est une tendance, sans doute liée à l’évolution des températures de surface des océans d’Avril à la mi-Mai 2017 et qui indique une situation neutre dans la Zone Enso de l’océan pacifique, une neutralité des anomalies de températures de l’océan indien, et un réchauffement de l’Atlantique tropical Nord. « Ce réchauffement associé au refroidissement de l’océan pacifique pourrait entraîner une prévision normale à excédentaire dans le Sahel, en particulier le Nord du Bénin », prévient-on.
Des dates de début de saison précoces sont attendues dans la partie septentrionale de notre pays en rapport avec les deux saisons citées plus haut. Le pays devrait aussi connaître des séquences sèches longues dans la deuxième moitié de la saison des pluies. Les déficits hydriques qui seraient liées aux dates de fin de saison précoces attendues dans l’Ouest de la bande Sahélo-soudanienne dont le Bénin, et aux séquences sèches plus longues en début de saison (sur presque toute la bande) et vers la fin de la saison (sur le Centre de la bande), pourraient affecter l’installation, la croissance et les rendements des cultures, de même que la mise en place des pâturages dans les zones concernées. Les séquences sèches attendues vers la fin de la saison et l’arrêt précoce des pluies pourraient aussi être favorables au développement de certains ravageurs des cultures, comme la chenille mineuse d’épis du mil.
Diligence et vigilance
Il n’est pas exclu, selon les prévisions, des niveaux élevés de risque d’inondation dans les parties supérieure, moyenne et inférieure du haut et moyen bassin de l’Ouémé. Face à tout ceci, des dispositions sont nécessaires pour résorber les déficits de productions potentielles dans les zones pouvant connaître des séquences sèches. L’Agence nationale de météorologie recommande de privilégier les espèces et variétés résistantes au déficit hydrique, les techniques culturales favorisant l’économie de l’eau du sol, et d’éviter les apports supplémentaires d’engrais, notamment azote, pendant la période d’installation des cultures et celles à risques de sécheresse. « C’est important avec les techniciens de la météorologie nationale et des services d’agriculture et d’hydrologie pour des informations agro-hydro-météorologiques et des conseils sur les variétés et techniques à utiliser », souligne Pierre Dako. Les risques de maladies sont à considérer.
Encadré : Un plan d’urgence pour Cotonou
Face à la menace persistance des inondations à Cotonou, le Préfet Modeste Toboula prévoit un plan d’urgence pour la capitale économique du Bénin. C’est ce qui ressort de la rencontre, le dimanche dernier, entre le Préfet du littoral, la hiérarchie militaire et les autorités du ministère du cadre de vie. Ledit plan devra permettre de faire partir les eaux stagnantes constatées dans certains quartiers inondables. Il a suffi d’une semaine constante de pluies sur la partie méridionale du Bénin pour que les populations subissent la menace des eaux notamment à Agla, Mènontin, Ste Cécile, Akpakpa. Fautes de moyens, la Mairie se défend de n’avoir pas pu faire le curage total des ouvrages d’assainissements. Cette mesure est alors attendue pour soulager un tant soit peu les populations, en attendant des actions durables.
Fulbert ADJIMEHOSSOU